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Reviewed by:
  • Le peintre dévorant la femme by Kamel Daoud
  • Alek Baylee Toumi
Daoud, Kamel. Le peintre dévorant la femme. Stock, 2018. ISBN 978-2-234-08373-8. Pp. 140.

Depuis quelques années, les directeurs de musées parisiens invitent un écrivain, un artiste, un intellectuel à visiter leur musée. Le journaliste Kamel Daoud, célèbre pour sa réécriture de L'étranger de Camus, a été l'hôte du Musée Picasso pendant une nuit d'automne dans le cadre de l'exposition "1932, année érotique". Pablo Picasso, âgé alors de cinquante ans, rencontre à Paris Marie-Thérèse Walter, une jeune femme de dix-huit ans, et lui demande de poser pour une série de portraits. Au milieu de cette nuit sacrée, Daoud se transforme vite en Persan de Montesquieu. Cet "occidentaliste" (53) a publié son expérience dans Le peintre dévorant la femme. Le livre se compose d'une trentaine de parties inégales, allant de quelques longs paragraphes à une dizaine de pages. D'entrée, Daoud se met dans la peau du peintre cubiste et donne une définition de l'érotisme: "L'érotisme est un rite de chasseur. Sauf, qu'il ne tue pas sa proie" (18). Daoud explique que les rôles sont renversés car c'est le chasseur qui aimerait être dévoré, s'enfouir dans sa proie. Il passe ensuite au sexe, sujet ô combien délicat chez les occidentaux puritains et tabou en langue arabe du Maghreb: "La maladie c'est quand la mort précède le sexe dans certaines cultures. C'est quand l'Au-delà se pose en arbitraire en soi et son propre corps" (31). Ceci explique un peu pourquoi les kamikazes islamistes se font exploser pour aller au paradis retrouver les houris. Avec des retours fréquents à Robinson Crusoé, Daoud affirme que pour comprendre les tableaux nus de Picasso, "il faut être un enfant du vers, pas du verset" (44). Ensuite, pour parler de désir et de sexualité dans les pays arabo-musulmans, Daoud crée un personnage islamiste nommé Abdellah et le fait pénétrer dans ce lieu profane. Cet artifice lui permet de démystifier le point de vue des djihadistes qui haïssent l'art et la culture. Altérer le corps—refaire un sein ou un nez—est considéré par ces misogynes pathologiques comme un péché, mais pas le meurtre. L'auteur imagine la panique d'Abdellah devant la nudité sur terre: "L'intense peine de deviner que le Paradis est ici, là, dans sa douloureuse brièveté, pourra le détruire" (86–87), c'est-à-dire détruire l'ordre du temps, et du coup, détruire la croyance d'Abdellah que la jouissance devrait suivre la mort, pas la précéder. Parlant des musées, Daoud se demande s'il est possible d'en avoir dans les pays arabes. Les passages sur l'art, la plage et les statues, notamment le génocide à Palmyre ainsi que la destruction de la statue de la fontaine à Sétif en Algérie, sont très instructifs. L'auteur conclut sur ce qu'adolescent il avait déjà compris, à savoir que "l'érotisme est la religion la plus ancienne, que mon corps est mon unique mosquée et que l'art est la seule éternité dont je peux être certain" (206). L'essai que nous offre Daoud est un coup de maître, l'auteur admirant les tableaux de Picasso est un Persan superbe. [End Page 198]

Alek Baylee Toumi
University of Wisconsin, Stevens Point
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