Abstract

Le présent article analyse les enquêtes et une commission sur des décès par hypothermie en Saskatchewan, au Canada. Il souligne les économies raciales et d’espace liées à ces décès, et il suggère que les relations structurelles propres au colonialisme de peuplement produisent et encouragent les expulsions continues et quotidiennes d’autochtones de la part des colonisateurs, expulsions qui sont inévitablement violentes. La ville coloniale appartient au colonisateur et son occupation est inévitablement récusée par la présence des autochtones dans la ville. L’autochtonité met mal à l’aise, car elle conteste la prétention du colonisateur à la légitimité en remettant en cause une fiction très tenace dans les états coloniaux selon laquelle les peuples autochtones seraient à l’agonie. La pratique qui consiste à repousser les autochtones aux périphéries de la ville vient du besoin des colonisateurs de maintenir les lignes de force des villes coloniales. Aujourd’hui, quand cette pratique est scrutée par le droit, comme ce fut le cas dans l’enquête sur le décès de Neil Stonechild, et dans des enquêtes sur les décès par hypothermie, elle est considérée soit comme le fait de quelques policiers sans vergogne ou encore on la nie carrément. Ce qui demeure dans les registres judiciaires, toutefois, ce sont les économies raciales d’espace dans la ville coloniale et la dévalorisation persistante de la vie autochtone, une dévalorisation que la loi produit et soutient. Dans la première partie, je présente des idées sur les économies raciales et d’espace de la ville coloniale. Dans la deuxième partie, j’étudie le cas du décès de Neil Stonechild, ainsi que la réponse du droit à ce décès, la Commission d’enquête Wright. Dans la troisième partie, j’analyse les enquêtes sur les décès par hypothermie de Rodney Niastus et de Lawrence Wegner, deux jeunes autochtones morts dix ans après Stonechild, et j’explore deux mouvements dans l’espace et le temps : Niastus et Wegner traversant la ville pour trouver la mort dans un champ gelé de la zone nord-ouest, et le cheminement que l’enquête nous invite à faire en nous faisant croire que Niastus et Wegner sont les seuls responsables de leur décès. Dans le panorama des décès d’autochtones en détention en Saskatchewan, y compris en prison, par suicide et à la suite de violents affrontements avec la police, le corps d’un autochtone est un corps qui ne peut être assassiné.

Abstract

This article examines inquests and an inquiry into freezing deaths in Saskatchewan, Canada. It outlines the racial spatial economies of which these deaths are a part, and it proposes that the structural relations of settler colonialism produce and sustain ongoing, daily evictions of Aboriginal people from settler life, evictions that are inevitably violent. The colonial city belongs to the settler, and Aboriginal presence in the city inevitably contests settler occupation. Aboriginality unsettles, challenging the settler’s claim to legitimacy by calling into question the colonial state’s most enduring fiction that Aboriginal people are a dying race. The dumping of Aboriginal people to the outskirts of the city is a practice born of the settler’s need to maintain the lines of force of the colonial city. Today, when dumping comes under legal scrutiny, as it did in the inquiry into the death of Neil Stonechild and in inquests into freezing deaths, it is either transformed into a practice of a few bad cops or denied outright. What remains on legal record, however, are the racial spatial economies of the settler city and its persistent devaluation of Aboriginal life, a devaluation that law both produces and sustains. In the first part of the article, I present ideas about the racial/spatial economies of the colonial city, and in the second part I examine the death of Neil Stonechild and the Wright Inquiry, which responded to this death. In the third part, I examine inquests into the freezing deaths of Rodney Niastus and Lawrence Wegner, two young Aboriginal men who died a decade after Stonechild, exploring two movements in space and time: Naistus and Wegner as they moved through the city towards their death in the frozen fields of the northwest section of the city and the journey we are invited on through the inquest, a journey through which we come to understand the deaths of Naistus and Wegner as no one’s fault but their own. Across the landscape of Aboriginal deaths in custody in Saskatchewan, including deaths in prison, deaths due to suicide, and deaths that occur in violent confrontations with the police, the Aboriginal body is a body that cannot be murdered.

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