In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Dans le TesTamenT spiriTuel D’ibn ‘arabī : l’homme, miroir De Dieu ; Dieu, miroir De l’homme Joseph Van Haeperen (Bruxelles) Le souci du respect de l’unicité de Dieu (le taw īd) doit-il réduire au silence tous ses véritables adorateurs ? Tenter d’expliciter cette unicité par le langage n’est-ce pas déjà, en principe, porter atteinte à cette unicité ? Tel est le débat auquel se trouve confronté Ibn ‘Arabī après tant d’autres penseurs de l’Islam. La réfraction de l’Un en la multiplicité de ses attributs ne conduitelle pas inévitablement à figer Dieu en une multiplicité de « figures », à le réduire à des proportions humaines, à ne pas le laisser être ce qu’il est ? C’est dans le cadre de ce débat qu’Ibn ‘Arabī fait appel, entre autres métaphores, à la symbolique du miroir. Les textes significatifs à cet égard ne manquent pas dans l’ensemble de son œuvre. Les Futū āt al-Makkīya, en français Les illuminations de la Mecque, véritable somme de la pensée du maître, mériteraient incontestablement d’être prises en considération. Nous nous sommes cependant limité à l’analyse de deux textes fondamentaux extraits d’un ouvrage que d’aucuns considèrent comme son Testament spirituel à savoir les Fu ū al- ikam, en traduction française littérale Les Gemmes des Sagesses. Ce faisant, nous sommes loin de verser dans l’originalit é. C’est, en effet, vers les Fu ū al- ikam que la plupart des commentateurs d’Ibn ‘Arabī se sont tournés. Alors qu’il n’existe que quelques commentaires portant sur l’ensemble des Futū āt, le nombre de commentaires consacrés aux Fu ū est impressionnant. Osman Yahya, éditeur critique des œuvres d’Ibn ‘Arabī, en recense plus d’une centaine. Et encore cette liste est-elle loin d’être exhaustive. Les deux textes qui feront principalement l’objet de notre attention font une large part à la symbolique du miroir. Ils sont issus des deux premiers chapitres des Fu ū al- ikam. Cet ouvrage comporte 27 chapitres. Chacun d’eux est consacré à l’un des aspects de la Sagesse de Dieu, illustré à chaque fois dans le verbe d’un des prophètes reconnus par l’Islam. Le premier chapitre s’intitule « Le chaton de la Sagesse divine dans le verbe d’Adam », et le second « Le chaton de l’inspiration dans le verbe de Seth ». Dans leur 220 Joseph Van haeperen argumentation chacun de ces chapitres recourt à la symbolique du miroir pour justifier le bien-fondé de deux thèses inverses : - l’une disant de l’homme qu’il est miroir de Dieu, - l’autre disant de Dieu qu’il est miroir de l’homme. Le fait d’être confronté à cette « contradiction » ne peut qu’être stimulant dès lors qu’il s’agit pour nous de mettre en lumière ce qu’implique le recours à la symbolique du miroir dans l’un et l’autre cas. 1. L’homme, miroir de Dieu Du premier texte qui fera l’objet de notre analyse1 , nous proposons la traduction suivante :« Quand Dieu – Louange à Lui – voulut, eu égard à ses noms très saints que l’on ne peut dénombrer, voir les essences de ceux-ci, et si tu veux, tu peux dire voir son essence, dans un être global qui concentre l’ordre tout entier, (ce dernier se trouvant) de son fait caractérisé par l’existence, (tout en sachant par ailleurs que) par l’intermédiaire de cet être global, il manifeste son secret à lui-même, c’est (qu’il entendait signifier par là) que la vision de l’au-delà de l’Être par lui-même n’est pas comparable à la vision qu’il a de lui-même dans une autre réalité qui est pour lui comme un miroir. C’est ainsi que l’au-delà de l’Être apparaît à lui-même dans une forme que donne le lieu de la vision. Il en résulte que l’au-delà de l’Être n’apparaîtrait pas pour lui-même sans l’existence de ce lieu et la forme ne le révèlerait pas à lui-même. Dieu – louange à Lui – avait créé le monde tout entier le dotant d’une existence d’ombre sans relief, dénuée de signification, et il était comme un miroir non encore poli. Mais il en va ainsi de la règle de conduite de Dieu...

Share