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Présence, effets de présence et sens de la présence CANADA Louise POISSANT Louise Poissant est doyenne de la Faculté des arts à l’Université du Québec à Montréal. Elle est l’auteure de nombreux ouvrages et articles publiés dans diverses revues au Canada, en France et aux États-Unis. Ses recherches actuelles portent sur les nouvelles technologies appliquées au domaine des arts de performance et sur le bioart. Au cours des dernières décennies, une multitude de figures et d’interventions de facture technologique ont gagné les arts de la scène et le monde de l’animation. Certes, la mise en scène théâtrale a un long passé d’inventions et de manœuvres permettant d’augmenter la scène, comme on le fait avec la réalité augmentée en incrustant de façon réaliste des personnages ou objets virtuels dans l’espace de la scène, ce qui permet de dépasser les limites physiques en vue de suggérer d’autres dimensions dans le temps et l’espace, et d’évoquer des univers réels ou fictifs. Depuis l’Antiquité, les gens de théâtre ont mis au point des dispositifs de médiation (portevoix , éclairages artificiels), des procédés créant des simulations (ombres chinoises, bruitage) ou des mécanismes produisant des effets spéciaux (fumée, disparition). Zaven Paré, créateur de marionnettes électroniques signale que: Les arts scéniques ont toujours été associés aux avancées technologiques de leur temps, non seulement pour la machinerie théâtrale et l’éclairage, mais aussi pour la création d’effets spéciaux. On constate que bien avant l’apogée de l’industrie du spectacle 16 Personnage virtuel et corps performatif avec l’avènement du cinéma, beaucoup d’inventions ont été inaugurées sur scène, souvent bien avant de répondre aux nécessités ou au confort de la vie quotidienne1 . Et malgré cette longue tradition de recours à des bricolages et à des machinations atteignant parfois une grande complexité, et en dépit des expériences pionnières au début du xxe siècle ayant convoqué les technologies les plus avancées de l’époque2 , il est étonnant de constater combien l’intégration des arts médiatiques s’est faite lentement et à quel point elle suscite encore maintenant de la résistance chez le public et le milieu. Or les applications des technologies au domaine théâtral sont illimitées et offrent des possibilit és permettant d’amplifier aussi bien le registre scénographique que celui de l’auteur dramatique et du jeu de l’acteur. Figure 1 Effets spéciaux, Castle Theatre, Český Krumlov, dans l’actuelle République tchèque. À gauche: machine de pluie, XVIIIe siècle; à droite: instrument pour imiter le bruit du vent, XVIIIe siècle.© À gauche: photo de Věroslav Škrabánek; à droite: photo de Lubor Mrázek. 1. Voir l’article de Zaven Paré dans le présent ouvrage. 2. Appia, Loïe Fuller, les constructivistes russes, les artistes du Bauhaus, Piscator, entre autres, ont utilisé les découvertes techniques (projections lumineuses électriques, cinéma, enregistrement sonore, etc.) du début du xxe siècle pour renouveler leurs mises en scène. Voir Louise Poissant, «Performativité et technologies au théâtre: procédés précurseurs», Théâtre/Public, no 205, octobre 2012, p. 97-108. [18.216.124.8] Project MUSE (2024-04-26 09:17 GMT) 17 Louise P OISSANT C’est pour explorer la rencontre des arts médiatiques et des arts de performance que nous3 avons entrepris en 2003 une réflexion sur les notions de théâtralit é et de performativité en questionnant plus particulièrement l’impact du médiatique sur les arts de performance. La notion de performativité est encore assez floue en dehors du champ de l’analyse du langage, et malgré quelques études remarquables de Richard Schechner, Judith Butler et RoseLee Goldberg, elle est encore très peu théorisée dans le domaine des arts de performance impliquant des personnages virtuels et des effets technologiques. Elle s’est alors retrouvée au cœur de notre réflexion et elle a progressivement glissé ou migré vers celle d’effets de présence: une œuvre qui arriverait à créer un effet de présence serait performative. La formule est assez simple, mais le phénomène est plus complexe qu’il n’y paraît...

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