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PRÉFACE LOUIS-JACQUES DORAIS UNIVERSITÉ LAVAL Il y a plus de cent ans déjà que les populations autochtones d’Amérique du Nord ont accès à l’éducation formelle telle qu’elle est définie par la société majoritaire au sein de laquelle ils vivent. Pendant très longtemps, cet enseignement scolaire a eu pour objectif d’assimiler socialement, culturellement et linguistiquement les premiers occupants du territoire, d’en faire des citoyens comme les autres : des chrétiens anglophones (ou, plus rarement, francophones) aptes au travail salarié (au bas de l’échelle dans la plupart des cas) et partageant les valeurs occidentales dominantes ; des « civilisés », en somme. Il n’est donc pas étonnant que la presque totalité des chercheurs, membres à part entière d’une société allochtone dont ils partageaient généralement les vues, aient longtemps délaissé l’éducation des Autochtones en tant que champ d’études. Les écoles et les pensionnats se livraient allègrement à leur travail d’assimilation, et tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. À la fin des années 1960, les choses ont, heureusement, commencé à changer. Les Autochtones qui, en dépit des traumatismes subis, avaient su préserver leur identité, leurs valeurs propres et, souvent, leur langue ont réalisé qu’ils devaient prendre leur éducation en mains s’ils voulaient s’affirmer en tant que nations ou peuples premiers pleinement reconnus, jouant un rôle actif et original sur la scène contemporaine. Cette prise de conscience, doublée d’un activisme politique et culturel en constant développement , se fit ressentir un peu partout dans le monde et mena, en 2007, à la pleine reconnaissance des droits autochtones par les Nations Unies, y compris le droit à un enseignement autocontrôlé. Dans plusieurs pays, dont le Canada, la participation autochtone à l’éducation avait d’ailleurs été en partie reconnue dès les années 1970, et les peuples premiers jouissaient – et jouissent toujours – d’un certain droit de regard sur leurs écoles. Les chercheurs commencèrent alors à se pencher sur l’éducation en contexte autochtone, et les travaux sur ce thème se multiplièrent. C’est dans cette lignée que s’inscrit le présent ouvrage, qui met l’accent sur la formation des enseignants inuit et des Premières Nations au Québec, tout VIII La formation des enseignants inuit et des Premières Nations en jetant, à titre comparatif, un regard sur la formation des maîtres autochtones mapuches du Chili. Les auteurs se sont fixé trois objectifs complémentaires : faire connaître les situations éducatives et de formation issues tant des pratiques en cours que des travaux de recherche ; mieux comprendre la dimension interculturelle de l’interaction de formation ; mettre en lumière certains aspects de la réalité linguistique des situations de formation. L’un des traits originaux de l’ouvrage, c’est d’avoir adopté une vision très large des processus de formation. Ceux-ci englobent tant les relations d’apprentissage au sein de la famille que les particularités de l’enseignement scolaire et les défis qu’il présente. Cette vision repose sur des exemples concrets, tirés de pratiques pédagogiques ainsi que d’études portant sur cinq nations autochtones du Québec, auxquelles s’ajoute, tel que nous l’avons déjà mentionné, une nation sud-américaine, les Mapuches du Chili. L’ouvrage combine des analyses parfois pointues – sur les caractéristiques du français parlé dans les communautés autochtones par exemple, ou sur l’épistémologie de la réalité interculturelle des Mapuches – avec des descriptions diversifiées d’expériences concrètes de formation. On y trouve aussi des analyses – parfois basées sur un vécu personnel – du contexte communautaire ou plus général dans lequel s’inscrit la formation des maîtres autochtones. Tous ces textes ont un point en commun : ils incluent toujours des observations concrètes, parfois très pratiques, sur la façon dont la formation des enseignants autochtones et, plus largement, l’éducation chez les Inuit et les Premières Nations peut et doit prendre en compte les particularismes épistémologiques, linguistiques, culturels et sociaux des maîtres et des élèves. Un esprit de profond respect pour les réalités autochtones anime cet ouvrage. Quelques auteurs appartiennent d’ailleurs à des peuples premiers, et tous bénéficient d’une excellente expérience de la pratique et de la recherche sur...

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