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Chapitre 1 Le contexte d’émergence du Musée de la civilisation et de la place de l’évaluation Bernard Schiele«C’est le temps que ça change1» L’enchaînement des circonstances et des décisions politiques qui ont conduit à la création du Musée la civilisation a été rappelé par Christine Tarpin (1998) dans son ouvrage consacré à l’émergence du Musée de la civilisation2 . Pour elle, la création du Musée de la Civilisation découle de la poussée de la Révolution tranquille qui fait de l’affirmation de l’identité collective francophone le «vecteur principal des transformations de la société québécoise3». La culture devient donc un enjeu de société et une arme politique. Et, en 19784 , le gouvernement québécois, qui se «positionne comme une instance mobilisatrice» et se veut le maître d’œuvre du développement culturel, table sur 1. Slogan illustrant le thème central de la campagne électorale de 1960 du Parti Libéral du Québec. L’arrivée au pouvoir de Jean Lesage marque le début de la Révolution tranquille (1960-1970). Ce chapitre, bien évidemment, ne porte pas sur la Révolution tranquille. Mais on ne peut manquer de souligner celle-ci tant elle a marqué le développement du Québec contemporain et, surtout, pour notre propos sur son évolution culturelle. Parmi d’autres, voir: Linteau, P.-A. et al. (1986). Le Québec depuis 1930, Montréal, Boréal; Bélanger, Y., R. Comeau et C. Métivier (dir.) (2000). La révolution tranquille: 40 ans plus tard: un bilan, Montréal, VLB. 2. Tarpin, C. (1998). L’émergence du Musée de la civilisation, Québec, Musée de la civilisation. 3. Linteau, P.-A. (2000). «Un débat historiographique: l’entrée du Québec dans la modernité et la signification de la Révolution tranquille», dans Bélanger, Y. et al. (dir.). op. cit., p. 21-41. 4. Ministère d’État du développement culturel, (1978). Livre blanc (dit rapport Camille Laurin): La politique québécoise du développement culturel. Vol. 1 – Perspectives d’ensemble: de quelle culture s’agit-il? Vol. 2 – Les trois dimensions d’une politique: genres de vie, création, éducation, Québec, Gouvernement du Québec. L’évaLuation muséaLe 12 la «responsabilité de tous» pour affirmer et préserver «la singularité du Québec5». C’est dans cette perspective, qui associe étroitement «patrimoine et nationalisme», que la recomposition du réseau muséal est envisagée et la création du Musée de la civilisation décidée en 19806 . Il ouvre ses portes le 19 octobre 1988. Son ouverture symbolise – pour ainsi dire – le moment où les changements profonds qui avaient transformé le Québec entrent dans la conscience de celles et ceux qui les avaient vécus. Même les critiques qui dénoncent le programme muséologique du Musée admettent, à contrecœur, que les choses ont irrémédiablement changé7 et qu’il n’est plus possible de concevoir le rôle du musée et de réaliser des expositions comme on avait l’habitude de le faire. L’effet d’entraînement du Musée est immédiat. Malgré les résistances qui s’y manifestent, le réseau muséal entame son passage à la modernité. Les musées québécois vont rapidement se recomposer et se réinventer. Quels étaient donc ces changements? Comment ont-ils affecté le champ muséal? De quelle manière le Musée en était-il la concrétisation? Pour répondre à ces questions, il est nécessaire de prendre du recul par rapport à l’évolution de la société québécoise. Plus précisément, il faut tenter de la saisir dans la dynamique de la révolution sociale et culturelle qui transmue les sociétés d’après-guerre. Sans quoi, il n’est pas possible de comprendre le mouvement de refondation de la muséologie dont le Musée est le fer de lance au Québec. Les innovations du Musée, comme la décision de privilégier les expositions thématiques, de se doter d’une programmation d’activités publiques, de créer un service de la recherche et de l’évaluation, montrent que les influences externes ont trouvé au Québec une conjoncture sociale, politique et économique qui réunissait leurs...

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