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CHAPITRE IV ÉCRIRE POUR CONVAINCRE La.rhétorique.de.l’écriture En effet, quand mon adversaire réfute ma preuve et que cela équivaut à réfuter mon affirmation elle-même, qui peut cependant être étayée par d’autres preuves – auquel cas, bien entendu, le rapport est inversé en ce qui concerne mon adversaire – il a raison bien qu’il ait objectivement tort. Donc, la vérité objective d’une proposition et la validité de celle-ci au plan de l’approbation des opposants et des auditeurs sont deux choses bien distinctes. A. Schopenhauer Pour certains, argumenter et persuader sont deux choses très distinctes. Elles appartiennent à des univers qui, quelquefois, peuvent s’entrecroiser , relèvent de situation de communication très dissemblables. L’argumentation est essentielle à la démarche scientifique; les Thèses doivent être soutenues avec rigueur et cohérence. La rhétorique appartient à la communication dialogique1 . Elle relève de l’échange entre deux ou, même si la chose paraît incongrue, plusieurs personnes. Pourtant, on comprend intuitivement qu’il ne suffit pas, même en science, d’avoir 1. Le terme dialogique vient de dialogue qui signifie, selon sa racine grecque, dia, «de l’un à l’autre», et logos, «discours», discours entre deux interlocuteurs. Cette définition est tirée de Michel Blay (dir.), Dictionnaire des concepts philosophiques, Paris, Larousse, CNRS Éditions, [2007], p. 214. 86 Argumenter son mémoire ou sa thèse un argumentaire solide, d’élaborer une preuve étoffée pour convaincre. La preuve, ensemble structuré et organisé des raisonnements, doit persuader . Ce serait une erreur aussi de considérer la rhétorique comme relevant seulement de procédés littéraires. On la définit comme l’art de plaire ou de persuader; elle est aussi l’art de réduire, selon la belle définition empruntée à Michel Meyer, la distance sociale2 . Voyons quelle place elle occupe dans la structure argumentative. Nous avons parlé plus haut de l’opposant. Le temps est venu d’exposer son rôle dans la mesure où le proposant s’adresse à un opposant . L’opposant est un sujet imaginé. Voyons en quel sens. Dans le cadre d’une recherche à la maîtrise ou au doctorat, on peut dire que les membres du jury représentent un opposant concret, mais imaginé3 . Ils représentent la communauté scientifique; ils ont la tâche de juger de la valeur de la Thèse et de l’argumentaire4 , de dire si elle répond aux exigences et aux critères d’un travail scientifique. L’opposant est là pour évaluer d’abord l’argumentaire et les différents raisonnements qui le composent. Il peut contester les arguments soit parce que le lien avec la Thèse n’est pas assez fort soit parce qu’il ne les juge pas pertinents. Dans ce dernier cas de figure, la critique est méthodologique; elle ne porte pas sur l’argumentation. Il peut aussi récuser les exemples qui les illustrent. Il arrive qu’il s’attaque à la Thèse elle-même parce qu’elle est mal formulée ou qu’elle n’est pas une réponse pertinente à la question spécifique de recherche. Elle peut être trop vague ; elle peut être normative ou prescriptive, c’est-à-dire difficile à démontrer et à argumen2 . Michel Meyer, op. cit. 3. Au moment de la rédaction, on ne connaît pas encore la composition de notre jury même si on peut en avoir l’idée. On sait pourtant qu’on devra se soumettre à une évaluation par un jury de pairs. Son absence/présence plane toujours sur le candidat. 4. Il arrive malheureusement trop souvent que les mémoires de maîtrise et les thèses de doctorat soient jugés sur d’autres critères; il y a en effet de nombreuses évaluations de nature idéologique, politique ou personnelle. Lorsqu’il y a une défense, une soutenance de thèse, l’impétrant peut se défendre et rappeler qu’il a à être jugé sur ce qu’il a écrit, sur sa démarche et beaucoup moins sur le contenu. Pourquoi le contenu a-t-il une importance moindre dans l’évaluation? L’explication est simple. Le contenu relève du cadre théorique, de sa capacité à donner une signification à tel ou tel phénomène. Intervenir sur le contenu, c’est souvent refuser le cadre théorique de départ. On ne peut jamais...

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