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3 Le rôle des médias Une dramatisation de la crise«La crise? C’est la faute aux médias!» Le Devoir, 8 janvier 20091 Au printemps 2008, les journaux étrangers font état de l’hypothèse d’une possible conspiration contre l’Islande, menée par médias interposés. Cette idée, disparue par la suite, conduit à une réflexion plus générale sur le rôle des médias, leur pouvoir et leurs effets pour exacerber l’agitation ou calmer les esprits au cours des crises. Pendant les événements de 2008, partout dans le monde, politiciens et banquiers accusent les médias de mal saisir les effets de leur pouvoir et de trop rechercher le sensationnel, au point de parfois créer les crises pour ensuite en faire état. Cette hypothèse pourrait s’appliquer non seulement au cas islandais, mais à toutes les crises, comme le suggère Mark Fenton-O’Creevy, professeur à l’Open University: «media stories on the current turmoil are not just reflecting events, they are also . [Anonyme, source PC], «La crise? C’est la faute aux médias!», Le Devoir, 8 janvier 2009. 1 La spectaculaire déroute de l’Islande creating them2 ». Pourtant, la couverture journalistique est essentielle pour fournir l’information, avertir le public, parfois analyser les situations et offrir un point de vue externe sur les événements. Sans compter que les journaux dévoilent quotidiennement une chronique du monde se déployant d’un article et d’un média à l’autre, et qui constitue une forme contemporaine de relation, une sorte de mémoire au jour le jour du temps contemporain:«Journalism, so the adage goes, is the first draft of history3.» Lors de la crise en Islande, les banques, les gouvernements et les financiers comprennent bien l’importance des communications et ils s’en servent abondamment pour tenter d’influencer les perceptions en leur faveur. Par exemple, alors que les signes de la crise se multiplient, le groupe Baugur prétend, par voie de communiqué, tout simplement le contraire:«Baugur has maintained that it is not affected by the economic turmoil in Iceland.» On agit comme s’il suffisait de dire pour créer les faits ou la réalité. D’une manière similaire, le gouvernement islandais répond non par une stratégie économique, mais par une stratégie de communication à l’agence de notation financière Moody’s, qui abaisse en mars 2008 les cotes des banques et de l’État islandais: «Le premier ministre, Geir Haarde, et [l]es établissements bancaires [islandais] ont engagé une bataille de communication contre ce qu’ils qualifient de défiance irrationnelle5 », écrit Le Monde. Faisant référence à la propagande de guerre, le président du conseil de House of Fraser, lié au groupe Baugur, dit en octobre, en plein cœur des événements: «It’s like in the war—“dangerous talk costs lives6”.» C’est aussi ce que croit une responsable polonaise des finances, qui considère que les réactions des marchés financiers rapportées dans les médias sont: «an “infection” that [is] based more on psychology than on economic fundamentals .» De la même manière, l’économiste en chef du Conference Board 2. Mark Fenton-O’Creevy, cité par Tim Harford, «Shock news? The media didn’t get us into this mess», Financial Times, 3 décembre 2008, p. 2. 3. Lionel Barber, «How gamblers broke the banks», Financial Times, 5 décembre 2008. . Lucy Killgren, «Moss Bros says Baugur talks continue», Financial Times, 3 avril 2008. 5. George Hay, «L’Islande, victime du “credit crunch”», Le Monde, 8 mars 2008, cahier Économie, p. 8. 6. Don McCarthy, cité par Tom Braithwaite, «Baugur evades Icelandic chill», Financial Times,  octobre 2008, p. 9. . Katarzyna Zajdel-Kurowska, citée par Jan Cienski et Thomas Escritt, «New EU members spared worst of crisis», Financial Times,  octobre 2008, p. 3. [3.19.56.45] Project MUSE (2024-04-25 17:51 GMT) Le rôle des médias 1 of Canada parle d’une «psychologie de la récession»: «Si [les médias] continuent à dire que le ciel nous tombe sur la tête, les gens pensent que le ciel leur tombe sur la tête8.» Personne ne doute que la crise économique qui secoue l’Islande à l’automne 2008 soit bien réelle – certainement pas les Islandais, pour qui l’exagération du discours médiatique n’aide en rien...

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