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10 Bisexualité et santé Une comparaison entre hommes et femmes Mélissa FORTIN Danielle JULIEN Sébastien CÔTÉ Jean BÉGIN Dans le contexte des transformations sociales sous l’impulsion des mouve­ ments militants des minorités sexuelles en Amérique, le retrait de l’homosexualit é du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-III-R, 1987) a éradiqué une conception pathologique de l’homosexualit é et ouvert la porte au développement de théories non cliniques. Depuis les travaux de Kinsey sur les comportements sexuels des hommes (1948) et des femmes (1953), lesquels ont révélé une forte prévalence de comportements sexuels avec les deux sexes dans la population américaine, plusieurs recherches ont montré que les catégories exclusives d’hétérosexualit é et d’homosexualité représentent mal la complexité de la sexualité humaine (Sanders, Reinisch et McWhirter, 1990). Le modèle dichotomique c h a p i t r e 300 Diversité sexuelle et constructions de genre de l’orientation sexuelle opposant une hétérosexualité exclusive à une homosexualité exclusive a été remis en question et des chercheurs ont travaillé à l’élaboration de modèles faisant une place à la bisexualité. Depuis l’épidémie du VIH/sida au début des années 1980, les recherches en santé ont joué un rôle important dans la mise en relief de la bisexualité. Les premières études en santé ont révélé que, comparées aux personnes hétérosexuelles, les personnes homo­sexuelles et bisexuelles confondues dans un même groupe présentent une plus grande vulnérabilité sur un ensemble de variables liées à la santé (pour une revue, voir Julien et Chartrand, 2005). Plus récemment, les études tendent à montrer que les personnes bisexuelles éprouvent davantage de problèmes de santé mentale que les personnes homosexuelles et hétérosexuelles (pour une revue, voir Dodge et Sandfort, 2007). Dans l’ensemble, les recherches comparant les personnes bisexuelles aux personnes homosexuelles révèlent que ce sont les personnes bisexuelles qui sont proportionnellement plus nombreuses à rapporter des problèmes de santé mentale et des perceptions défavorables de leur santé mentale (Jorm, Korten, Rodgers, Jacomb et Christensen, 2002). De même, si la plupart des études sur la consommation d’alcool et de drogues montrent que les personnes de minorités sexuelles sont proportionnellement plus nombreuses que les personnes hétérosexuelles à rapporter des degrés élevés de consommation d’alcool et de drogues (pour une revue, voir Hughes et Eliason, 2002), ce sont les personnes bi­sexuelles qui rapportent les plus hauts taux de consommation (Burgard, Cochran et Mays, 2005; Ford et Jasinski, 2006; Eisenberg et Wechsler, 2003). Selon les résultats de plusieurs études, il n’y aurait pas de différence importante de prévalences entre les hommes et les femmes rapportant des comportements sexuels avec les deux sexes et s’auto-identifiant comme bisexuels (pour une revue, voir Julien et Chartrand, 2005). Par ailleurs, des résultats de recherches suggèrent que leur expérience est différente. L’analyse qualitative des entrevues menées par Medico, Lévy, Otis, Laroche et Lavoie (2003) auprès de personnes ayant des comportements sexuels avec des hommes et des femmes ou se reconnaissant comme bisexuelles montre que les préjugés perçus envers la bisexualité varient en fonction du sexe des répondants, les femmes se disant moins stigmatisées que les hommes. Plusieurs auteurs mentionnent qu’à la suite de l’épidémie du VIH/sida, les hommes bisexuels ont été considérés comme des responsables de la propagation du virus chez les personnes hétérosexuelles (Kennedy et Doll, 2001). Dans une étude d’Eliason (1997) sur la biphobie chez les personnes hétérosexuelles, 30% des répondants étaient d’accord avec cette [18.227.114.125] Project MUSE (2024-04-25 22:09 GMT) Bisexualité et santé 301 hypothèse responsabilisant les hommes bisexuels. Selon l’étude de Medico et ses collègues (2003) sur la bisexualité, les hommes bisexuels rapportent être souvent perçus comme des homosexuels en transition alors que les femmes bisexuelles rapportent être souvent considérées comme des femmes hétérosexuelles hypersexualisées. Les préjugés envers les hommes et les femmes qui endossent une des dimensions de la bisexualité pourraient influencer le lien entre les dimensions de l’orientation sexuelle et les diff érentes variables de santé. Par exemple, à la lumière des pr...

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