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Ouverture À ce moment de notre itinéraire, plusieurs motifs nous entraînent vers une discussion à propos de la mort comme événement. Aussi, jusqu’à présent, ont été mises en relief les expressions de la vie qui président à notre rapport à la mort, à travers le rapport au temps, à la violence, à l’identité, à l’avoir et à l’apparence, suivant une propension courante à la fascination. En nous intéressant à ce que la vie devait à la conscience de la mort, ne serait-ce que par le désir de créer du vivant et des significations de celui-ci, dépassant l’entendement hyper-individualiste, nous avons campé les bases des modes de défense universels que sont la négation, dans sa poussée différenciante, et le déni, qui, lorsqu’il se durcit, conduit à l’indifférenciation, du temps même de notre vivant, dans la violence symbolique jusque dans la violence perpétrée contre soi. Sur ce fond du rapport à la mort s’élaborant et se révélant au creuset de nos manières de vivre, ce rapport à la mort n’est pas que révélé. Une forme de dialogue s’instaure entre, d’une part, ce qui se construit peu à peu à travers les événements de la vie et, d’autre part, ce que l’événement de la mort même convoie, toujours surprenamment, et en même temps, toujours modulé par la formation antérieure des sensibilités. Et désormais, la fascination les colore. Or, lorsque la mort est présente, quelles émotions suscite-t-elle et, au sein de celles-ci, comment les angoisses se manifestent-elles, si tant est qu’elles le puissent? En retour, comment ce qui se passe – ou non – autour de l’avènement de la mort de l’autre vient-il moucheter, quand ce n’est entacher, ou au contraire, illuminer le cours de nos jours? Et d’abord, 246 La fascination – Nouveau désir d’éternité comment la mort se passe-t-elle, qu’est-ce qui en fait signe? Mais surtout, comment peut-on mettre en relation ces conduites devant la mort, sa présence , au compte-gouttes, éventuellement en traces repérables de ce qui fut et du destin, puis médiatisée, avec des manifestations du vivre qui pourraient à prime abord leur sembler étrangères? Si jusqu’à présent nous avons suivi un tracé qui voulait dégager le caractère mortifère de la fascination du treillis de nos conduites quotidiennes, nous emprunterons dans cet autre versant une démarche inverse, en offrant en exergue certains phénomènes actuels associés de plain-pied à la réalité de la fin humaine. Et c’est à partir de cette réalité, dans ce qu’elle provoque de fascinant ou non, que nous visiterons les territoires mentaux avec ce qui peut bien s’y forger. Dans la palette des thèmes qu’il était possible de traiter, il fallait choisir, et la préférence va à ce qui, à travers la littérature foisonnante sur«la mort», reste tout de même quelque peu en retrait. Comme nous l’avons déjà indiqué à quelques reprises, la question du deuil intime et de ses méandres ne sera pas visitée ici; nous en réservons une meilleure exploration pour la suite du présent travail critique. Le récit, si l’on peut dire, accroché à «il était une fois la mort», débute dans le chapitre 8 par la mort de l’autre, celui que connaissions, appréciions, aimions. Cette mort ne nous laisse pas indifférents, loin s’en faut. C’est que la mort signe en la personne de cet autre l’irrécusable indifférenciation, avec le cadavre comme symbole universel. Symbole de ce qui nous altère au propre, de ce qui, par la mort, se dissout dans le magma de la matière, il connaît en ces décennies un sort tout à fait inédit. Si tous constatent sa disparition progressive des pratiques entourant la mort, peu d’entre nous se sentent à l’aise de questionner les motifs de cette désertion et de les mettre en lien avec la violence qui nous environne et nous déconcerte parfois. Ce cadavre disparaissant, qu’est-ce qui disparaîtrait d’autant? Si l’on ne peut simplement évoquer un effet de mode, on devrait toutefois considérer un autre phénomène qui, lui, marque le retour spectaculaire du...

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