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Conclusion Dans la plupart des pays du Tiers-Monde sous-développés, mald éveloppés, dépendants, la modernisation de l’agriculture a créé une situation dramatique dans les campagnes. Le développement rural s’est appuyé sur la création d’un secteur agricole performant bien doté en moyens techniques et en aides publiques, et qui doit le plus souvent produire des cultures d’exportation afin d’obtenir les devises nécessaires au maintien d’un mode de vie à l’occidentale des classes urbaines dominantes. Les petits paysans dont les cultures vivrières avaient le mérite de nourrir une population largement rurale sont laissés pour compte quand ils ne perdent pas leur terre. Paradoxalement à la croissance du P.N.B., les conditions de vie pour de larges couches sociales rurales se détériorent ; c’est la malnutrition ou la famine. Dans un pays développé comme le Canada qui n’appartient pas encore de plein droit, il est vrai, au club des nations hégémoniques, le phénomène des disparités régionales, de l’inégal développement de l’espace national a été comparé à la situation prévalant à l’échelle mondiale entre les formations sociales centrales et les formations dépendantes ou périphériques. Si cette comparaison fait image, si elle sert à certaines couches sociales pour légitimer leurs revendications et leurs luttes, elle ne peut faire l’économie d’une analyse des conditions réelles dans lesquelles opère l’inégal développement au sein d’une même formation sociale appartenant à l’univers des sociétés libérales avancées. La modernisation du secteur agricole a réussi à créer une richesse alimentaire qui a mis ces sociétés hors d’atteinte du fléau de la famine. Cela ne s’est pas fait selon une logique de développement autocentré ; le « pillage du Tiers-Monde » apparaît comme une composante essentielle de ce succès économique ; il s’agit alors d’une situation artificielle née 388 AGRICULTURE ET DÉVELOPPEMENT RURAL d’un système de domination et non d’une situation normale, optimale, d’un modèle à proposer aux nations candidates au processus de développement. La décomposition de la paysannerie a pu se faire dans une relative douceur car le développement industrialo-urbain créait des emplois pour ce que l’on appelait, dans le jargon économique, la maind ’œuvre libérée de l’agriculture où elle était sous-employée. L’agriculture a donc joué un rôle de réservoir ou de repoussoir de la main-d’œuvre selon la conjoncture économique. L’histoire de l’Est du Québec illustre bien ce phénomène. Une société rurale originale allait s’y créer ; le peuplement se réalise par vagues successives liées aux périodes de récessions économiques. Il résulte autant de l’attrait de ses ressources naturelles que des besoins d’un élargissement de l’occupation du sol sous la pression démographique. Mais l’attachement au sol n’a rien d’une vertu cardinale de ce peuple malgré l’image de soi projetée par les idéologies globales des classes dominantes. Avant de s’installer dans les arrières-pays des régions périphériques, jusqu’en 1930, près d’un million de Québécois avait quitté le sol natal pour la Nouvelle-Angleterre où la révolution industrielle réclamait du « cheap labor ». Dans la mesure où avec l’urbanisation de la société québécoise, l’exode rural pouvait fonctionner, la société rurale n’a pas connu, au XXe siècle, une pression démographique sur les terres cultivables. Les exploitations agricoles n’eurent pas à se morceler et purent opérer des remembrements au fur et à mesure des départs. Contrairement au TiersMonde , les exploitations restantes demeuraient assez grandes pour se payer cette modernisation. Il se produit alors des phénomènes inverses à ceux du Tiers-Monde : une dépopulation tellement grande dans certains espaces qu’elle menace l’existence même des établissements humains sur ces territoires. Mais les mécanismes de la gestion des ressources naturelles dans une économie capitaliste ont pu jouer leur rôle, ce qui a signifié un réaménagement des cultures et des productions animales en fonction de ce que l’on appelle les « coûts comparatifs » et qui manifestent la soumission de...

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