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8. Relations internationales ALLEZ ET PROLIFÉREZ par Fabien Gruhier Qu’on le veuille ou non, la technologie nucléaire pacifique peut toujours déboucher sur des applications militaires. C’est une question de temps, d’argent et de volonté politique, mais pas de technologie à proprement parler. Faire proliférer les centrales, mais aussi les usines d’enrichissement et surtout celles de retraitement, c’est laisser proliférer l’arme atomique, depuis l’arsenal ultra-sophistiqué jusqu’à la bombinette bricolée. Chercher à empêcher cette prolifération — quand on est assis sur ses mégatonnes et qu’on fait une course délirante aux gadgets de mort —, c’est faire montre d’hypocrisie, de naïveté ou d’angélisme. Ou plus simplement d’un sens machiavélique de la défense de ses intérêts politiques et économiques. 191 FACE AU NUCLÉAIRE La planète compte aujourd’hui 34 États disposant de centrales électro-nucléaires en fonctionnement ou en chantier. Le recours à l’atome s’ouvre ainsi aux pays les plus divers, grands ou petits, riches ou pauvres, démocratiques ou totalitaires, communistes ou monarchistes, et se« démocratise » avec une étonnante rapidité. Il ne s’agit que des centrales « pacifiques ». L’accession à la bombe atomique semble quant à elle beaucoup moins épidémique : seuls les États-Unis, l’URSS, la Grande-Bretagne, la France, la Chine et l’Inde ont des armes nucléaires. Même si l’on ajoute, à tout hasard et sans la moindre preuve, un ou deux autres États, membres clandestins de ce « club », détenant eux aussi le feu nucléaire et se gardant bien de l’avouer (on cite volontiers l’Afrique du Sud et Israël mais cela, répétons-le, reste à prouver), on constate que seule une petite minorité de ceux qui possèdent des centrales ont « la » bombe. En fait, depuis vingt-cinq ans, le nombre des pays possesseurs de centrales a été multiplié par dix ; celui des possesseurs de bombes n’a guère que doublé. On pourrait en conclure que la bombe atomique intéresse de moins en moins de monde, et que, dans leur immense majorité, les amateurs de technologie nucléaire ne s’intéressent sincèrement qu’à ses vertus pacifiques. Mais la mise sur pied d’un arsenal atomique, œuvre de longue haleine, repose précisément sur les centrales « pacifiques ». Ces dernières constituent en somme la première pierre de l’édifice scientifique et industriel dont la bombe marque le couronnement. La frénésie avec laquelle on voit actuellement tant d’États s’équiper en centrales sous prétexte de produire de l’électricité « pour le bien de leurs peuples » peut donc aussi bien s’interpréter comme une course à la bombe : dans cinq, dix ou quinze ans, ce fruit infernal éclorera un peu partout sur les arbres plantés aujourd’hui au nom du progrès. 192 [18.221.165.246] Project MUSE (2024-04-25 14:28 GMT) D’où les très vives préoccupations de divers gouvernements — et au premier chef ceux des pays qui détiennent déjà la bombe, tout particulièrement les États-Unis. Il ne s’agit pas seulement pour eux de la peur de perdre le monopole de la terreur : s’estimant à tort ou à raison doués d’une sagesse et d’une bonne volonté qui ne sont certes pas l’apanage de toutes les dictatures du monde, ils craignent de voir l’arme absolue tomber en de mauvaises mains, et font donc tout ce qu’ils peuvent pour en freiner la dissémination. Les technologies « sensibles » Impossible d’interdire ou d’empêcher la dissémination des centrales électro-nucléaires. Une telle prétention serait insoutenable politiquement, techniquement et moralement : au nom de quoi refuser aux peuples qui en ont effectivement besoin l’énergie nécessaire à leur développement ? Une telle prétention, de la part des pays riches, développés et...« énergivoraces », serait à bon droit qualifiée de colonialiste. De toute façon, en elle-même, une centrale pacifique l’est effectivement : en principe, il est relativement facile de s’assurer — par des contrôles et visites effectuées sous l’égide de l’Agence internationale de l’énergie atomique (l’AIEA dépendant des Nations-Unies) — qu’elle ne sert à rien d’autre qu’à fabriquer de l’électricité. Il semble en conséquence à peu près admis que la technologie des centrales électro-nucl...

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