In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

C H A P I T R E Hommage à Ernst von Glasersfeld Carolyn Kieran Université du Québec à Montréal et CIRADE kieran.carolyn@uqam.ca 12 [3.140.185.123] Project MUSE (2024-04-26 02:26 GMT) Hommage à Ernst von Glasersfeld 207 C’était en 1983. La didactique des mathématiques émergeait du linceul du béhaviorisme. Jacques Bergeron de l’Université de Montréal et Nicolas Herscovics de l’Université Concordia avaient accepté d’organiser à Montréal la cinquième rencontre annuelle d’un groupe récemment formé : le North American Chapter of the International Group for the Psychology of Mathematics Education (Bergeron et Herscovics, 1983). Le thème choisi par les organisateurs était la recherche en didactique des mathématiques dans une perspective épistémologique. Traditionnellement, l’épistémologie traitait de questions telles que : Quel est le sens de connaître ? Comment la connaissance se développe-t-elle ? Quelles sont les conditions nécessaires à sa croissance ? Pourquoi était-ce un temps propice pour remettre en question la philosophie implicite sous-jacente à la recherche passée ? Un nombre assez élevé de chercheurs étaient devenus conscients, à ce momentl à, du cul-de-sac dans lequel les avait souvent conduits une approche béhavioriste naïve par rapport à la didactique des mathématiques. Une telle approche avait, par exemple, mené à une perception algorithmique des mathématiques, avait réduit l’apprentissage de cellesci à l’acquisition d’habiletés et avait considéré l’enseignement comme une simple transmission de connaissances. À l’opposé, une perspective constructiviste, qui émergeait à la fin des années 1970 avec la recherche d’Ernst von Glasersfeld, de son collègue Leslie Steffe et de leurs étudiants de l’Université de Géorgie aux États-Unis, mettait l’accent sur la pensée et le raisonnement dans l’apprentissage des mathématiques, l’acquisition de la connaissance étant perçue comme une construction par l’apprenant, et le rôle de l’enseignant comme consistant à guider l’élève dans sa construction. Ces deux perspectives opposées et divergentes allaient nécessairement influencer le type de questions de recherche que l’on poserait, ainsi que la méthode utilisée. Il était nécessaire – selon les deux organisateurs de la conférence – de discuter et de débattre à fond les implications de cette opposition afin d’éviter des écueils possibles. La conférence rassembla plusieurs Québécois et leurs collègues canadiens et américains – tous ensemble dans un vieux couvent de l’est de Montréal. Parmi les professeurs-chercheurs québécois qui particip èrent et firent des exposés, mentionnons : Maurice Bélanger, André Boileau, Benoît Côté, Jean Dionne, Jean-Guy Dubois, Stanley 208 Constructivisme – Choix contemporains Erlwanger, Claude Gaulin, Claude Janvier, Carolyn Kieran, Gisèle Lemoyne, Dieter Lunkenbein, Roberta Mura, Nicole Nantais-Martin, Richard Pallascio et Ewa Puchalska. Ernst von Glasersfeld était le conférencier invité à la séance pléni ère du PME-NA, en septembre 1983. Sa conférence avait pour titre :« L’apprentissage en tant qu’activité constructive ». Pour plusieurs d’entre nous, c’était la première occasion d’avoir un contact direct avec cette perspective théorique constructiviste. La théorie n’était pas nouvelle, car ses racines se trouvaient dans la théorie de Piaget, mais nous savions quel sort avait été fait à son épistémologie par les interpr ètes et les traducteurs. Ernst von Glasersfeld partagea avec nous quelques-unes de ses réflexions – des réflexions théoriques qui ont marqué notre recherche au cours des décennies qui ont suivi. Voici quelques extraits de sa conférence (von Glasersfeld, 1983). Il y a dix ou quinze ans, il aurait été presque inconcevable de soumettre des éducateurs ou des chercheurs en éducation à un exposé se proposant de traiter d’une théorie de la connaissance. La préoccupation des éducateurs était de faire pénétrer les connaissances dans la tête de leurs étudiants et dans celle des chercheurs en éducation, et de trouver de meilleures façons d’y parvenir. Il n’y avait alors que peu d’incertitude, si même il en existait, en ce qui avait trait aux connaissances que les étudiants devaient acquérir, et l’on était convaincu que, d’une façon ou d’une autre, la connaissance pouvait être transmise d’un enseignant à un étudiant. La seule question était de savoir quel était le meilleur moyen de réaliser ce transfert – et...

Share