In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

CHAPITRE 1 CRISE DE LA MODERNITÉ ET PRATIQUES COMMUNAUTAIRES D’INSERTION DES JEUNES 1. CRISE DE LA MODERNITÉ Les efforts gigantesques déployés dans la reconstruction d’une Europe dévastée par la Seconde Guerre mondiale ont été à l’origine d’une croissance économique sans précédent dans l’ensemble des pays occidentaux, notamment en Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord. Il en a résulté une industrialisation et un développement social extraordinaires de leurs sociétés. À cet égard, et dans une perspective de changement social, on peut dire que la modernité (Voyé, 1998, p. 62-82) a atteint sa vitesse de croisière durant la période qui s’étend de l’aprèsguerre à la première « crise du pétrole » au début des années 1970. À partir de la décennie 1970-1980, les pays hautement industrialisés connaissent un ralentissement marqué de l’économie. Ce ralentissement va se transformer en une crise générale dont l’une des conséquences les plus graves est le chômage persistant d’une fraction significative de la population. Dans les pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et depuis le début des années 1970, les jeunes forment la catégorie sociale la plus touchée par les 10 Insertion des jeunes, organisation communautaire et société problèmes d’emploi et de travail. En 1980, le taux de chômage des jeunes (pourcentage de la population active) au Canada était de 13,2 %, alors qu’aux États-Unis, en France, au Royaume-Uni et en Italie, il était estimé respectivement à 13,3 %, 15 %, 13,5 % et 25,2 %. Seuls l’Allemagne et le Japon affichaient au cours de la même période de faibles taux de chômage chez leurs jeunes, soit de 3,9 % et 3,4 %. En 1989, ce taux était de 10,5 % au Canada et aux États-Unis, de 26,5 % en France, 39,3 % en Italie, 15 % au Royaume-Uni, 6,5 % en Allemagne et 5,3 % au Japon (OCDE, 1989). Loin de baisser, le taux de chômage des jeunes s’est plutôt accru dans les pays industrialisés au cours des années 1970 et 1980. On constate que, si les jeunes sont en général durement frappés par le chômage, ils ne le sont pas de façon identique. En effet, certains jeunes le sont plus que d’autres. Il s’agit de la catégorie que Claude Dubar (1987) a appelée l’autre jeunesse, à savoir les jeunes dont les rapports à l’école ont été marqués par des difficultés particulières : redoublement, échecs scolaires répétés et décrochage ou abandon prématuré du système scolaire. La période de croissance économique extraordinaire de l’Occident (1945-1975), surnommée Les Trente Glorieuses, a été caractérisée par la volonté d’adapter le système d’enseignement aux besoins socioéconomiques des sociétés en intense industrialisation, développement et modernisation. Cette volonté s’est traduite par la démocratisation de l’éducation, faisant de l’école un des mécanismes principaux d’intégration sociale. Mais cette démocratisation aura eu pour conséquence, parmi d’autres, une explosion scolaire qui, conjuguée aux crises économiques de 1970 et 1980, rendra très aigu le problème toujours actuel de l’insertion sociale et professionnelle des jeunes en général et des décrocheurs scolaires, des sansqualifications , des prestataires d’assistance sociale en particulier. Les pays industriels avancés d’Europe et d’Amérique du Nord doivent faire face depuis la fin des Trente Glorieuses, à un phénomène social d’une grande importance, à savoir l’exclusion et son corollaire, l’insertion sociale et professionnelle de leur jeunesse. Les problèmes d’exclusion et d’insertion des jeunes générations sont devenus, pour ces sociétés, un énorme défi qui dépasse désormais les capacités des seules institutions auxquelles revient traditionnellement la fonction d’intégration sociale des individus et des groupes : la famille, l’État, l’école et l’Église. Bref, on constate une véritable crise de la fonction de ces institutions. Pour l’Europe, on peut citer, entre autres, Mauger, [18.218.172.249] Project MUSE (2024-04-26 14:12 GMT) Crise de la modernité et pratiques...

Share