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X Du traitement moral à l’occupation thérapeutique : le rôle inusité de l’infirmière1 psychiatrique à l’Hôpital Saint-Jean-de-Dieu, 1912-1962 Bb Marie-Claude Thifault et Martin Desmeules C’est au cœur de l’arrondissement montréalais Mercier-HochelagaMaisonneuve (MHM) que sont ancrés les vestiges de l’hôpital psychiatrique Saint-Jean-de-Dieu. Les pavillons de pierre, érigés à la fin des années 1890, sont actuellement coincés entre un centre commercial, une autoroute, une station de métro et le complexe d’habitation des Cours Lafontaine2. Cet hôpital, devenu le Centre hospitalier Louis-H.-Lafontaine en 1976, se retrouve aujourd’hui au cœur d’un nouveau quartier qui s’est développé sur une vaste partie de l’ancienne propriété de l’institution asilaire. L’environnement rural caractérisé par son isolement, autrefois propice aux soins des malades mentaux, s’est franchement urbanisé. Si bien que ce secteur, jadis fui par la population en général, accueille maintenant dans la rue Hippolyte-Bergeron3 les propriétaires de nouveaux condos. Exactement là où vivaient encore, dans les décennies 1960 et 1970, les exclus de la société 1. À l’instar des Sœurs de la Providence, nous utiliserons tour à tour les appellations«garde-malade» et «infirmière», considérées pendant la période étudiée comme étant synonymes. 2. Étienne Bouchard, «À l’ombre de la station Radisson, les Cours Lafontaine», Avenir, arrondissement Pointe-aux-Trembles-Montréal-Est, 2006. Disponible à l’adresse : www. avenirdelest.com/article-46554-A-lombre-de-la-station-Radisson-les-Cours-Lafontaine .html. Consulté le 4 janvier 2010. 3. Nom de l’architecte qui a conçu les plans de l’asile complètement rebâti après l’incendie de 1890. Grand répertoire du patrimoine bâti de Montréal. Disponible à l’adresse : http://patrimoine.ville.montreal.qc.ca/inventaire/fiche_zone.php?&id=1096#. Consulté le 4 janvier 2010. 230 L’INCONTOURNABLE CASTE DES FEMMES 230 québécoise. Ceux-là mêmes, internés pendant 10 ans, 20 ans ou parfois plus4, qui ont été soumis à un processus de désinstitutionnalisation5 selon différentes approches thérapeutiques orchestrées par les Sœurs de la Providence, propriétaires de l’institution et responsables de l’École des gardes-malades de l’Hôpital Saint-Jean-deDieu , spécialisée en soins infirmiers psychiatriques. Les Sœurs de la Providence, sœur Augustine en tête6, contribuent au cours du demi-siècle d’existence de leur école de gardes-malades (1912-1962) à la mise en place de soins spécialisés prodigués par un personnel qu’elles veulent mieux formé. Ainsi, elles participent au fort courant de médicalisation qui marque, au cours du XXe siècle, toutes les institutions hospitalières en quête de «modernité»7. Cette transformation des soins spécifiquement médicaux dans les hôpitaux généraux oblige les Sœurs de la Providence à abandonner peu à peu leur fonction caritative et à offrir à leurs étudiantes une formation spécialisée basée sur les plus récentes découvertes médicales. On peut présumer que, par conséquent, il allait de soi d’amorcer également des changements sur le plan des soins au sein de l’institution, en intégrant entre autres les étudiantes infirmières dans les différents départements regroupant les hyperactifs, les épileptiques, les séniles ou les cas de psychose. Comment, dans ce contexte, en préconisant les modèles de soins mis en place dans les hôpitaux généraux, se développent les soins infirmiers psychiatriques à Saint-Jean-de-Dieu? Et comment s’organisent les soins aux psychiatrisés dans un univers où, hormis les infirmeries, l’environnement asilaire a si peu en commun avec l’hôpital général? Selon Cynthia Toman, l’influence de la technologie médicale sur la prestation des soins au chevet des malades contribue à faire reconnaître la spécificité du travail infirmier. Les gardes-malades doivent en effet posséder un bagage de connaissances scientifiques et maîtriser l’emploi de certains appareils technologiques8. Subséquemment, qu’en est-il lorsque les gestes «techniques» sont peu ou non requis pour traiter des patients atteints de troubles mentaux? Quelle forme prend le «travail corporel9 » à l’hôpital psychiatrique10, en pleine métamorphose en milieu hospitalier et objet de débat entre infirmières «professionnelles» 4. André Cellard...

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