ReFocus: The Films of François Ozon by Loïc Bourdeau (review)

Diplômé de La Fémis (1994), François Ozon réalise depuis 1988 des courts et longs métrages fortement influencés par l'imagerie cinématographique et médiatique, la littérature, la musique et la peinture. De nombreux entretiens, articles et chapitres, dont certains rédigés par des collaborateurs du présent ouvrage, sont disponibles sur les œuvres d'Ozon. Or, seuls deux ouvrages spécialisés couvraient à ce jour le parcours fécond, agile et polyvalent de ce réalisateur qui sort un film presque tous les ans. Dirigé par Loïc Bourdeau, ReFocus: The Films of François Ozon s'avère donc une importante contribution à la réflexion critique sur le cinéaste. Le volume se veut une étude de la résistance globale chez Ozon aux codes normatifs d'expression sexuelle et genrée, contestation dont témoignent les dialogues, la narration, la cinématographie, la mise en scène, ainsi que les choix d'intertextualité et d'interprétation littéraire. L'ouvrage propose de "se focalis[er] sur la théorie queer, le féminisme et l'intersexualité"¹⁹ (1) et parvient à remettre en question, dans certains cas, les arguments de célébration d'Ozon en tant qu'auteur, en explorant les lacunes et en creusant l'engagement de ses films dans le contexte sociopolitique français.

Ce volume est une contribution opportune qui s'ajoute aux monographies déjà consacrées au réalisateur, l'une écrite par Thibault Schilt (2011), également auteur d'un chapitre dans ce livre, et l'autre par Andrew Asibong (2008). Cet ouvrage s'ajoute également à des volumes théoriques tels que New Queer Cinema de Michele Aaron (2004), The Oxford Handbook of Queer Cinema de Ronald Gregg et Amy Villarejo (2021) et surtout French Queer Cinema de Nick Rees-Roberts, qui comprend quelques pages sur Ozon (2008). Partie intégrante de la série ReFocus, cette étude vise à apporter de nouvelles approches interdisciplinaires sur ce réalisateur pour un public en dehors de l'Hexagone et intéressé dans les études filmiques françaises.

La force du volume collectif réside dans la variété des perspectives adoptées par des chercheurs renommés et émergents dont les travaux se focalisent sur le cinéma français et belge, les études françaises et la culture queer. Selon l'approche unique de Bourdeau, "chaque contributeur.trice a choisi un film qu'iel apprécie (soit pour des raisons qui lui sont propres, soit pour les possibilités théoriques offertes à l'occasion par le film)" (4).²⁰ Le résultat est une lecture cohérente faite par des auteurs qui ont su créer des analyses indépendantes d'autres travaux, tout en incorporant suffisamment de comparaison et d'interrelations pour nous amener à redécouvrir d'autres chapitres. Le choix des images est d'ailleurs judicieux. Ces images nous invitent, au-delà des lectures proposées, à nous intéresser à la présence physique des protagonistes, à leur développement et à la capacité d'Ozon à saisir leurs histoires.

L'introduction prépare bien le terrain en apportant des éléments de compréhension du cinéma du réalisateur, sans décourager ceux qui ne connaissent pas la totalité de ses 19 longs métrages et de sa douzaine de courts métrages recensés au moment de la publication du volume. Elle aborde la réception et souligne l'importance de l'intertextualité, qu'il s'agisse des œuvres de Rainer Werner Fassbinder, Juan Mayorga, Joyce Carol Oates, Ruth Rendell, Maurice Rostand, ou Elizabeth Taylor, parmi d'autres. Sans être didactique dans son ton ou diffus dans ses explications, Bourdeau invite le lecteur à explorer la théorie du cinéma queer et ses nombreux aspects présentés par des chercheurs de la première heure et d'autres plus récents. Il met habilement en relation les contributions afin de guider le lecteur...