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Reviews 245 Bizot, Véronique. Âme qui vive. Arles: Actes Sud, 2014. ISBN 978-2-330-2732-2. Pp. 112. 14,80 a. Après Mon couronnement (FR 84.5) et Un avenir (FR 86.3), Bizot continue sa réflexion sur la complexité de l’existence et des liens affectifs. On retrouve dans ce troisième roman la même étrangeté des décors et la solitude choisie des personnages, toujours accompagnées d’un silence à la fois doux et pesant. Dans une région montagneuse , deux frères habitent une ferme isolée et à moitié ravagée par un incendie survenu neuf ans plus tôt qui coûta la vie à dix personnes. Suite à cet accident traumatisant, le jeune frère, seul survivant, est devenu un“être lent, mutique, déficient” (18) dont le frère aîné a désormais la charge:“Mon frère et moi n’avions plus personne [...] Mon frère n’était là que pour moi, à cause de moi. J’étais la cause de mon frère” (19). À l’heure du drame, ce traducteur spécialisé en littérature italienne et l’aîné des six enfants avait refusé de se rendre au chevet du père mourant, ce qui lui avait ironiquement épargné la mort. Depuis, les deux frères mènent une vie recluse en s’accrochant aux détails absurdes du quotidien. Ils entretiennent des rapports amicaux avec leurs seuls voisins, Adrien Fouks, l’auteur de théâtre misanthrope, et Montoya, l’ermite installé dans l’atelier d’un ancien peintre. Le jeune frère, à qui le timbre de voix manque, est paradoxalement un narrateur fort loquace doté d’une activité cérébrale intense.Témoin privilégié de la vie de ces trois hommes soudés par une marginalisation désirée, le narrateur fait“l’apprentissage de la solitude et de la vieillesse”(41) et réussit à s’intégrer à ce modèle familial fragile. Chaque homme joue un rôle déterminant dans la vie du narrateur: le frère représente un support affectif tandis que Montoya et Fouks lui donnent accès à une éducation physique et livresque. Pourtant, chaque personnage porte encore les blessures du passé. Si Fouks est “né dans une famille misérable” (20), Montoya,“l’orphelin” (68), fut prisonnier en Bolivie puis assista à la mort d’un de ses collègues à Moscou. Quant au frère aîné, il souffre toujours d’un échec amoureux. À Turin, il avait aimé passionnément Laura Davos, une femme mariée qui n’avait finalement pas quitté son mari. Notons que l’incapacité à forger des relations amoureuses durables est un thème récurrent dans l’œuvre de Bizot. Ses personnages sont généralement hantés par la disparition ou la perte, si bien qu’ils préfèrent s’exclure d’un monde qui leur échappe. Lorsque le frère aîné meurt subitement , le narrateur, lui, retrouve bizarrement la parole. Il abandonne le lieu familial et s’occupe de Fouks et Montoya,rêvant de l’instant où il saura quitter son environnement accommodant pour enfin s’affronter à la vie. À travers une écriture qui évoque celle de Balzac—Eugénie Grandet est citée à plusieurs reprises—Bizot décrit l’absurdité de l’existence, la fragilité des êtres et la perplexité des personnages face à une réalité qu’ils choisissent de fuir. Siena College (NY) Nathalie Degroult ...

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