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Reviews 267 surface feuilletée semblait dure comme l’ardoise” (108), ou cette “aube blafarde” (79) quand “les braises de la nuit devinrent les cendres du matin” (160). Mais Coher retranscrit à merveille, ces bruits, ces sensations qu’elle éveille et notre relation avec elle: l’expérience de la mer. Si l’entreprise n’est pas nouvelle, la juxtaposition de personnages “improbables” donne au récit une certaine fraîcheur et l’empêche de tomber dans la mièvrerie. Au contraire, malgré quelques passages dans lesquels l’accumulation de termes techniques est frustrante, Nord-nord-ouest parvient à attiser chez le lecteur l’imaginaire lié à la mer qui habite chacun d’entre nous. Villanova University (PA) Étienne Achille Désérable, François-Henri. Évariste. Paris: Gallimard, 2015. ISBN 978-2-07014704 -5. Pp. 165. 16,90 a. Tout a déjà été écrit sur Évariste Galois, mathématicien de génie, mort en duel à vingt ans en 1832, nous annonce le narrateur au début de ce roman. On ne compte en effet plus les essais, les biographies, les thèses et les articles publiés sur la vie d’Évariste, le “Rimbaud des mathématiques”, qui a révolutionné l’algèbre moderne. Quel intérêt y a-t-il alors à raconter la jeunesse heureuse de ce génie à Bourg-la-Reine, ses années au Collège Louis-le-Grand à Paris, la découverte de sa passion pour les mathématiques, son talent méconnu de ses contemporains, les mois d’incarcération dans la prison de Sainte-Pélagie au temps de la Révolution de Juillet, son échec amoureux et finalement sa mort précoce à vingt ans? Or, ce récit du génie mal connu du grand public fonctionne également sur un niveau métadiégétique, et invite le lecteur à devenir témoin de l’écriture,“the making of”de cette bio-fiction. Le narrateur intradiégétique, dont le nom reste inconnu, interpelle“de vive voix”une jeune femme,“mademoiselle”, personnification du lecteur.“Ensemble”, ils se cachent sous le lit du collégien Évariste à l’écoute des bruits dans le dortoir; ils arpentent les rues parisiennes que le mathématicien a fréquentées; ils se retrouvent dans la même chambre avec Évariste et sa bien-aimée Stéphanie. Ainsi, le lecteur assiste-t-il aux grandes scènes du roman, il est là avec Évariste à revivre des pans entiers de sa vie jusque-là mal éclairés. Le narrateur nous l’assure avec ironie: “Je vous parlerai d’Évariste tel qu’il fut et non tel qu’on le fit” (24). Jouant avec le lecteur tout en précisant qu’il n’est pas historien, le narrateur fond l’Histoire et l’histoire d’une façon délectable. Tout en se basant sur des biographies et des manuscrits historiques—y compris des lettres écrites par le jeune génie citées dans le roman—le narrateur reconstruit la vie d’Évariste en palliant les lacunes. Avec de l’esprit et un humour truculent, le narrateur recrée un être en chair et en os dans un cadre du début du dix-neuvième siècle—le règne de Louis-Philippe, les Trois Glorieuses—qu’il fait renaître jusqu’aux odeurs et aux sons des rues parisiennes. Il conjecture, il fabule à cœur joie en présentant“le champ des possibles” (159), comme lorsqu’il évoque le proviseur de l’établissement scolaire qu’Évariste a fréquenté: “[C]’est comme ça que je l’imagine, mais rien ne prouve que sa bonhomie fût factice, je ne suis pas certain qu’à l’époque on portait déjà le monocle, et pour dire la vérité, je doute que la barbichette fût à la mode” (52). En même temps,“le Nombre en personne” côtoie non seulement “le Verbe,” Nerval, mais fréquente également Dumas père, Raspail et le mathématicien Cauchy. En vingt ans menés tambour battant, ce protagoniste aussi talentueux qu’imparfait vécut mille vies. Mélangeant avec brio les registres—le familier, le lyrique et l’érudit—François...

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