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Reviewed by:
  • Plaire, aimer et courir vite réal. by Christophe Honoré
  • Marius Conceatu
Honoré, Christophe, réal. Plaire, aimer et courir vite. Int. Vincent Lacoste, Pierre Deladonchamps, Denis Podalydès. Pelléas, 2018.

Étude de masculinités en crise, ce film commence comme une tragicomédie, vire à l'histoire d'amour et finit comme un coup de poing dans l'estomac. C'est le début des années 1990 et Jacques (Pierre Deladonchamps), écrivain parisien de 39 ans, vivant sa sexualité et ses relations sociales avec une urgence de rigueur étant donné son statut séropositif, est obligé de gérer une double responsabilité—pour son fils Loulou et son ancien petit-ami, Marco, mourant du SIDA. Lors d'un voyage à Rennes, Jacques rencontre Arthur (Vincent Lacoste), étudiant breton et charmant qui aime sa liberté. En effet, il refuse de définir sa relation avec sa petite-amie (elle veut savoir s'ils sont amoureux ou non) et pratique les rencontres anonymes nocturnes avec les hommes. La relation de Jacques et Arthur ne peut être que fragmentaire, car ni l'un ni l'autre n'est disposé à déménager et Jacques ne cherche plus que des aventures courtes et sans complications. Arthur est séduit par la passion du désenchantement et le manque de maturité que l'écrivain deux fois plus âgé que lui se plaît à cultiver. Témoin des excès et des enfantillages de Jacques, son voisin Mathieu (Denis Podalydès), journaliste d'un certain âge, incarnation d'un certain stéréotype gay (cynique et méchant), dévoile progressivement une bonté dévouée doublée d'une timidité attendrissante. Dans une des scènes révélatrices pour ce personnage et parmi les plus drôles du film, Mathieu reçoit la visite inopinée de Jacques qui demande d'emprunter sa voiture pour se rendre en Bretagne pendant que l'escorte musclé engagé par le journaliste assiste nu à leur négociation. Malgré les drames sous-jacents, l'histoire est souvent racontée avec une légèreté dont l'effet va bien plus loin qu'un simple contrepoint. Chaque scène entre Jacques et Arthur est un jeu de séduction, souvent livresque, avec Jacques dans le rôle du maître—à penser, à lire et à aimer. Reste mémorable la conversation téléphonique dans laquelle il explique au jeune homme, qui vient de coucher avec un étudiant qu'il avait connu à peine quelques heures avant, la typologie des blonds en recourant à des renvois à la haute culture (Walt Whitman) et à la culture populaire (la revue Maxim's). Cet artifice narratif est, certes, recherché et prétentieux, mais le traitement ludique et l'interprétation des acteurs nous permet de nous concentrer sur le sens profond de cette relation: éphémère, désinvolte et inoffensive jusqu'au point où l'on cesse de la vivre comme dans les livres. Ce sont la musique et la danse qui ponctuent l'évolution de ce trio lorsque les références littéraires cessent, et c'est alors que le film redevient grave et que l'émotion s'en empare définitivement. Mathieu, c'est finalement nous, le spectateur. Et un Podalydès à mille nuances, formidable de vulnérabilité, [End Page 190] volant la vedette dans chacune de ses scènes, rend bien palpable le fardeau du survivant. Quant à Arthur, il y a un moment dans le film qui suggère de façon troublante une traversée cinématique, puisqu'il pourrait bien devenir personnage du très primé 120 battements par minute, dont ce film est le pendant non-militant et non-révolté.

Marius Conceatu
University of South Dakota
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