In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • La France au miroir de l'immigration by Stéphane Perrier
  • Francis Mathieu
Perrier, Stéphane. La France au miroir de l'immigration. Gallimard, 2017. ISBN 978-2-07-272705-4. Pp. 290.

En dépit du titre et du contenu de son ouvrage, l'auteur, cadre dans l'industrie, prétend que l'immigration ne constitue pas son sujet principal. Peut-être que cette affirmation sert à justifier la présence quelque peu surprenante d'autres sujets qui n'ont rien à voir avec l'immigration, mais qui comme celle-ci sont chers aux actuels populistes européens. C'est en effet une perspective populiste à bien des égards que l'on trouve dans cet essai. Les partisans du Front national en France ou de Donald Trump aux États-Unis y trouveront leur bonheur, les autres beaucoup moins. Quelle que soit la position de chacun vis-à-vis de l'immigration, il serait intéressant de se pencher sur l'influence qu'elle exerce sur la France, comme le promet l'introduction. Mais en guise de réflexion scientifique, on se trouve confronté à une profusion d'opinions néoréactionnaires, dont voici quelques exemples. Les gouvernements successifs de ces dernières décennies auraient laissé se développer une immigration de masse. Le racisme s'expliquerait par le nombre trop élevé d'étrangers, qui par ailleurs réclameraient"des adaptations" culturelles en leur faveur (25). Il existerait un fossé trop profond entre la civilisation européenne et "les civilisations encore partiellement traditionnelles" d'où proviennent les immigrés récents (31). L'identité nationale s'effriterait pour laisser place à un collectif désamour de soi. Toujours selon l'auteur, "La religion, ou plus exactement l'islam" (39) serait un frein à l'intégration. Les interdits alimentaires de l'islam et le voile seraient contraires aux moeurs françaises. L'histoire entre les chrétiens et les musulmans serait parsemée de conflits, comme les Croisades, ce qui rendrait la cohabitation difficile. Si l'on suit une telle logique, que devrait-on alors penser de l'histoire entre la France et l'Angleterre? On en arrive presque à la théorie du complot lorsque l'auteur affirme que l'objectif des organisations antiracistes ne serait pas de combattre le racisme, mais"la mise en accusation permanente et exclusive des Français d'origine européenne" (139). Quant au modèle d'intégration plébiscité par l'auteur, il ressemble à s'y méprendre à l'assimilation. On trouve également de nombreux sujets sans lien avec l'immigration. L'auteur dit ne pas comprendre pourquoi, depuis Chirac, les gouvernements français ont admis une part de responsabilité de la France dans les crimes nazis commis sur son territoire. Il ne supporte pas plus que la colonisation européenne soit aujourd'hui diabolisée, alors que "toutes les grandes civilisations ont [End Page 253] joint la domination par les armes au rayonnement par l'esprit" (130). Enfin, on ne s'étonne guère que l'auteur soit eurosceptique, déclarant que l'Union européenne est "une version moderne de despotisme éclairé" (196). L'auteur a beau rassurer fréquemment le lecteur sur ses bonnes intentions, cela sonne bien creux, lorsqu'il soutient par exemple qu'il ne prête pas à l'immigration un rôle causal aux maux qui accablent la France, comme la profonde crise morale et politique qu'il dénonce; qu'il n'est pas contre les musulmans; ou qu'il est normal que les étrangers ou Français issus de l'immigration souhaitent conserver leur langue ou leur culture d'origine.

Francis Mathieu
Southwestern University (TX)
...

pdf

Share