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Reviewed by:
  • La matière et l'esprit: la littérature scatologique au XVIIIe siècle éd. by Alain Chevrier
  • Michael J. Mulryan
Chevrier, Alain, éd. La matière et l'esprit: la littérature scatologique au XVIIIe siècle. Garnier, 2018. ISBN 978-2-406-06652-1. Pp. 1459.

Le contenu de cette anthologie est encore plus scandaleux que n'indique le titre. Ces textes reflètent tout un monde qui a disparu, un monde dans lequel les excréments étaient omniprésents, voire inévitables dans la vie quotidienne du dix-huitième siècle. Sans cette facette du vécu des Français des Lumières, on n'a qu'une vision incomplète de l'époque et de sa réalité physique. Cette réalité de la matière, ce recueil la présente de manière exquise. Chevrier a rassemblé maints ouvrages fascinants et a divisé son édition en cinq parties: "Contes", "Poèmes et chansons", "Essais et pamphlets", "Récits et anecdotes", et "Théâtre: parades, proverbes, parodies". Il n'y a pas de romans ici, puisque l'on n'en a pas trouvé uniquement dédié à ce sujet. Chaque ouvrage est commenté avec des notes détaillées, précises et instructives. La qualité littéraire des textes varie, mais ces ouvrages dépassent les intérêts des critiques dans ce domaine: les linguistes qui s'intéressent à l'histoire de la langue française, les historiens de la vie quotidienne, les sociologues, les anthropologues, aussi bien que les littéraires vont tous y trouver leur compte. On a rassemblé des textes qui n'ont jamais été publiés au vingtième siècle et qui sont quasi inaccessibles sans ce recueil. À l'époque où on les publiait, il était dangereux d'y afficher son identité comme auteur. Néanmoins, quand c'est possible l'éditeur fait une enquête scientifique afin d'identifier le vrai auteur. L'envergure de cette anthologie est vaste, et les approches vis-à-vis du sujet sont nombreuses: la majorité des textes présentés sont explicites, alors que d'autres auteurs préfèrent les sous-entendus. Il y a très peu de noms illustres ici, mais on y trouve tout de même quelques extraits de Restif de la Bretonne et de Voltaire, tels quelques articles peu connus du Dictionnaire philosophique portatif. De nombreux textes sont dédiés à "l'art" de péter, à l'adoration du pet, aux différents types de pets, à la sodomie et aux clystères. Dans leur quasi-totalité, ils sont parodiques ou satiriques. On y découvre quelques aspects de l'histoire de l'homophobie, de l'anticléricalisme, mais également de la moquerie de l'aristocratie. Il y a beaucoup de bijoux, mais les textes sur "la Société des Francs-Péteurs" (une société courtoise et fictive dédiée à la glorification et la [End Page 258] perfection du pet), les "Pamphlets révolutionnaires" (qui se moquent de la reine et de l'aristocratie) et toutes les treize pièces du théâtre de foire et des boulevards sont d'une valeur historique exceptionnelle. On retrouve des pièces, par exemple, que les comédiens ont dû jouer sans parler, en présentant les paroles avec des écriteaux, à cause des interdictions que la Comédie-Française avait imposées au théâtre du peuple. Cette anthologie est une référence indispensable pour tout dix-huitièmiste, car elle fournit des éclaircissements que l'on trouve difficilement ailleurs.

Michael J. Mulryan
Christopher Newport University (VA)
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