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Reviewed by:
  • Boys by Pierre Théobald
  • Patrick H Moneyang
Théobald, Pierre. Boys. Lattès, 2019. ISBN 978-2-7096-6324-3. Pp. 224.

Comment décrire la masculinité—ou plutôt les masculinités—de manière à conjurer la toxicité qui les gangrène? La question est d'actualité et semble sous-tendre l'écriture des dix-sept nouvelles composant l'ouvrage. Toutes gravitent autour d'un (auto)portrait d'homme en situation de vulnérabilité et qui livre un récit dont il est bien souvent le personnage principal. Tout part de l'histoire d'Antoine. Après douze ans de vie commune, il se sépare de Cécile et sombre dans la détresse de la solitude amoureuse. Lorsqu'il apprend le décès de son ex-belle-mère et bien qu'hésitant, il décide d'assister aux obsèques où il revoit son ex-femme. Les deux engagent une conversation qui se poursuivra au restaurant. Une soirée bien arrosée les mènera à passer la nuit ensemble, laissant présager une réconciliation possible. Pourtant, une approche genrée relèguera en arrière-plan ce récit heureux d'une réconciliation et verra que cette première nouvelle thématise surtout la masculinité en lien avec la souffrance du divorce. À cet effet, le regard du narrateur plonge dans le cœur d'Antoine et scrute son ressenti afin de dévoiler la douleur qui s'y cache depuis sept ans: malgré ses multiples efforts, il n'a pas pu se reconstruire une vie amoureuse après son divorce. La raison en est que Cécile est et reste son "grand amour" et "le seul" (12). Avec le cheminement d'Antoine, la voix narrative s'attaque donc aux clichés qui continuent à définir le "vrai" hétérosexuel en fonction de son succès auprès des femmes, sa force de caractère et surtout, sa capacité à ne pas "étaler sa sensiblerie" (30). Affranchies de ces avatars, les autres voix masculines s'élèvent, elles aussi, contre nombres d'idées reçues structurant encore négativement la condition masculine. Ceci fera dire à un personnage féminin écoutant parler un homme: "c'est rare d'entendre un homme confier ce genre de choses" (170). Au-delà de la surprise, ce constat est révélateur de la stratégie narrative de l'auteur, à savoir jeter le trouble sur les modèles dominants des masculinités à partir d'un discours de l'intime porté par le genre masculin. Dans les nouvelles, ce discours se décline en deux axes. D'une part, elles présentent des hommes—hétérosexuels—brisant le silence sur les douleurs d'habitude tues par honte, gêne, peur ou tout simplement parce qu'ils sont restés conditionnés par des modèles archaïques de ce que doit être un homme. D'autre part, chacune problématise une ou plusieurs facettes de la "fragilité" des hommes dans divers contextes tels que la paternité, le vieillissement, le deuil, la santé productive, l'adultère et bien d'autres. En cela, elles forcent le lecteur à (ré)examiner ses propres préjugés sur les hommes. Ce parti pris d'une écriture fondée sur la monstration de la fragilité masculine domine du reste l'ouvrage et en fait une référence pour les études des masculinités dans l'imaginaire contemporain français dont se nourrit le texte. Par ailleurs, étudiant(e)s et enseignant(e)s de français apprécieront le recueil pour les multiples dialogues et monologues des personnages. Leur ancrage dans la réalité en fait un précieux document didactique sur la culture et la langue (familière) parlée en France d'aujourd'hui. [End Page 253]

Patrick H Moneyang
Pacific Lutheran University (WA)
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