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Reviewed by:
  • Le siècle des vérolés. La Renaissance européenne face à la syphilis sous la dir. par Ariane Bayle et Brigitte Gauvin
  • Véronique Montagne
Le siècle des vérolés. La Renaissance européenne face à la syphilis
Ariane Bayle et Brigitte Gauvin (dir.) Grenoble : Million, 2019, 336 p., 49.95 $

Comme cela est spécifié dans le sous-titre, Le siècle des vérolés est une anthologie composée par une douzaine de collaborateurs. Celle-ci regroupe des textes parus dans la sphère européenne entre 1495 (depuis Marcello Cumano, médecin des chefs de l’armée vénitienne) et 1623 (avec Théophile de Viau) sur la (grosse) vérole, pathologie qu’on ne nommera « syphilis » qu’au tournant des XVIIIe et XIXe siècles. Notons que les textes sont systématiquement cités en français.

Les choix faits dans les douze chapitres permettent d’appréhender les différents aspects de cette maladie, qui a profondément marqué les imaginaires de l’époque préclassique, mais aussi de cerner les caractéristiques d’une épistémologie médicale qui s’exprime dans les [End Page 491] langues vernaculaires (français, italien, anglais, etc.) et dans la langue véhiculaire qu’est alors le latin.

Chaque chapitre est précédé d’une introduction qui permet d’insister sur les enjeux des points présentés et chaque texte cité est introduit par quelques indications sur son auteur et le contexte de production de l’œuvre.

Le premier chapitre aborde ainsi les questions de nomination/ dénomination ou de désignation de la maladie – questions fondamentales dans l’identification de la pathologie – grâce à des extraits empruntés notamment à Jérôme Fracastor, Gabriel Fallope, Olivier de Magny et Peter Loewe. Le deuxième chapitre aborde – avec Jean Fernel ou David Le Planis Campy, par exemple – les questions d’étiologie (avec l’évocation habituelle des causes divines, entre autres explications) et de symptomatologie. Ce dernier point est l’occasion pour les auteurs cités de mettre en évidence l’aspect protéiforme, et donc difficilement saisissable, de la maladie. Le troisième chapitre porte sur les figures mythiques et religieuses autour de la pathologie, qui s’incarne ponctuellement chez un représentant allégorique comme « Dame Vérole » – Jean Lemaire de Belges est ainsi cité, tout comme Annibal Caro ou Ramon Pané. Le quatrième chapitre aborde la question de la thérapeutique, avec Gaspard Torella et Louise Bourgeois, cette dernière mentionnant, au fil de sa narration, la culpabilisation dont furent alors victimes de nombreuses femmes.

Le cinquième chapitre permet de rapporter quelques expériences personnelles et quelques témoignages de patients dans des textes autopathographiques, des témoignages intimes et pathétiques de ce que fut la vie des vérolés. Le chapitre suivant aborde une question liée à ce dernier enjeu, celle de la stigmatisation dont ont été victimes ces patients, suspectés de véhiculer une atroce contagion et ponctuellement capables – comme le fut Charles de Sigogne en 1617 – de retournement du stigmate infamant. Cette stigmatisation, qui est le creuset de propos misogynes, résulte d’un jugement social conséquemment redouté. Dans le septième chapitre, c’est l’aspect thérapeutique de la pathologie qui est abordé dans ses dimensions préventive et curative. Le mal désarçonne alors les médecins, qui cherchent des remèdes, comme le mercure ou le bois de gaïac (notamment vanté par Jérôme Fracastor). Dans les huitième et neuvième chapitres, c’est la propagation d’une maladie qui déborde les frontières des continents européen, asiatique et africain qui est étudiée, ainsi que ses retombées économiques, que ce soit dans les [End Page 492] groupes des médecins, des chirurgiens-barbiers ou des prostituées. Le dixième chapitre porte sur les stratégies de dissimulation déployées par les patients (ou par les médecins), préoccupés par la possible stigmatisation évoquée précédemment. Dans le long onzième chapitre, ce sont les usages polémiques de la maladie...

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