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  • Inventer le don de sperme. Entretiens avec Georges David, fondateur des CECOS by Fabrice Cahen et Jérôme van Wijland
  • Simone Bateman
Inventer le don de sperme. Entretiens avec Georges David, fondateur des CECOS Fabrice Cahen et Jérôme van Wijland Paris: Éditions Matériologiques, 2016, 114 p., 9 €

La publication de l'ouvrage que Fabrice Cahen, historien, et Jérôme van Wijland, conservateur de bibliothèques et directeur de la Bibliothèque de l'Académie Nationale de Médecine, consacrent à l'histoire de vie et à la carrière du Professeur Georges David, est une excellente nouvelle. Peu de choses sont connues sur la vie professionnelle de cette discrète personnalité du monde médical ayant œuvré à la légitimation de la pratique, longtemps clandestine, de l'insémination artificielle en France. L'ouvrage vient combler cette lacune en nous proposant un portrait nuancé de ce médecin atypique, dont le parcours va bien au-delà de l'histoire des CECOS (Centres d'étude et de conservation du sperme humain) annoncée dans le titre du livre.

Ce titre se réfère à l'ouvrage de Jean-Paul Gaudillière Inventer la biomédecine1 qui a inspiré leur démarche : il s'agit de situer la « genèse du système CECOS […] dans un moment précis de l'histoire des sciences et des techniques biomédicales, dans une certaine configuration de l'administration de la santé publique, et dans un agencement particulier d'acteurs et d'actrices » (p. 8). Pour ce faire, Cahen et van Wijland choisissent la voie de l'histoire orale : ils mènent, entre septembre 2012 et février 2015, une série d'entretiens avec Georges David, fondateur de ce système. Ces entretiens visent à clarifier des points factuels relatifs à la création du premier CECOS ; à découvrir les aspects « plus latéraux et plus personnels » [End Page 224] de la carrière de Georges David ; et à confronter le « regard rétrospectif » du patron à celui de ses collaborateurs (p. 9). Cahen et van Wijland retravaillent leur matériau pour le présenter sous la forme d'un récit de vie, dont la seconde partie relative aux CECOS est entrecoupée d'extraits d'entretiens avec les proches collaborateurs de Georges David à l'époque. L'introduction propose une mise en perspective de ce matériau par un bref rappel de la « protohistoire de la lutte contre la stérilité involontaire » (p. 11) et souligne l'originalité de la contribution de Georges David à cette histoire, en ce que le « socle » du système CECOS est « une œuvre à la fois collective et interdisciplinaire » (p. 14).

En effet, à la lecture, il apparaît assez rapidement que l'objectif initial de ce projet – retracer la genèse du système CECOS – n'est finalement pas l'intérêt principal de cet ouvrage. Car, en racontant comment un jeune médecin, dont l'aspiration première était de devenir médecin de famille, a fini par faire une carrière hospitalière et des contributions marquantes dans plusieurs spécialités médicales – pédiatrie, gynécologie-obstétrique, hématologie, histologie-embryologie –, les entretiens éclairent, de façon plus large, les transformations du monde médical, et en particulier de la hiérarchie hospitalière d'avant et d'après-guerre dans laquelle Georges David a évolué. Bien qu'ayant refusé de tenter l'internat, voie royale aux postes les plus prestigieux dans cette hiérarchie médicale, Georges David a fini par créer une nouvelle spécialité, sans pour autant s'y enfermer : « Lorsque je suis moi-même devenu spécialiste, j'ai toujours voulu conserver l'ouverture du médecin généraliste. » (p. 25). Les entretiens dévoilent que c'est précisément son indépendance à l'égard des grands patrons et sa capacité à travailler en réseau avec d'autres spécialités, qui lui ont permis d'ouvrir, au sein de l'organisation hospitalière, un espace permettant la mise en œuvre et le développement d'une activité médicale – l'exploration de l'infertilité masculine – nécessaire mais mal g...

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