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  • On Hysteria: The Invention of a Medical Category between 1670 and 1820 by Sabine Arnaud
  • Rudy Le Menthéour
On Hysteria: The Invention of a Medical Category between 1670 and 1820. By Sabine Arnaud. Chicago: University of Chicago Press, 2015. xi + 351 pp., ill.

Cet ouvrage, initialement paru en français (L'Invention de l'hystérie au temps des Lumières (1670–1820) (Paris:Éditions de l'EHESS, 2014)) et issu d'une thèse soutenue à l'EHESS en 2007, frappe par l'envergure du propos. Si l'hystérieaététrès étudiée dans son rapport avec les stéréotypes sexuels ou avec l'émergence de la psychanalyse, il s'agit de la premièreétude exhaustive consacrée à 'l'invention de cette catégorie médicale', bien avant son couronnement spectaculaire au dix-neuvième siècle. En rupture avec l'histoire de la médecine traditionnelle, l'auteur se place sous le patronage postmoderne de Michel Foucault et dans le sillage des nouvelles humanités médicales (Anne Vila, Vincent Barras, Alexandre Wenger). En dépit du titre, l'innovation nosologique ne joue donc qu'un rôle mineur face à l'examen desfigureslittéraires, des effets de discours et des postures rhétoriques. Ce déplacement permet à l'auteur de sortir du cercleétroit des questionnements nosologiques (François Boissier de Sauvages, Philippe Pinel) pour s'attacher aux pratiques médicales nouvelles que trahissent lesécrits sur l'hystérie. Cette démarche proche de l'histoire culturelle a pour intérêt majeur de réunir sous un même regard critique des textes de natures très variées, des consultations épistolaires à La Religieuse de Diderot en passant par les Archives de la Société royale de médecine. L'ampleur des recherches, l'attention portée aux extraits, la remarquable maîtrise des sources secondaires anglophones et francophones, ne peuvent cependant masquer deux [End Page 270] défauts. Tout d'abord, une certaine négligence vis-à-vis de la tradition antique conduit à sous-estimer la permanence du caractère sexuel de cette pathologie. Mais c'est avant tout un vice de méthode qui compromet à nos yeux la validité de l'entreprise. En effet, si le premier chapitre accorde une importance capitale à l'invention de la catégorie d'hystérie (hysteria) par Boissier de Sauvages dans sa Nosologia methodica (Amsterdam: Frères de Tournes, 1763), l'auteur se détourne ensuite de ces questions nosologiques. Ce changement de perspective, qui a ses avantages comme nous venons de le voir, s'opère au prix d'un manque de rigueur: loin de montrer comment les nosologues ont réuni sous un même terme des maux naguère conçus comme distincts, l'auteurévoque les pratiques d'écriture liées à la description de 'pathologies that would come to be called hysteria' (p. 53). Cette démarche téléologique permet à l'auteur d'assimiler cette hystérie à venir avec tout un ensemble de maladies aux manifestations littéraires et médicales fascinantes (hypochondrie, mélancolie, 'vapeurs'). Si la proximité des symptômes et la porosité nosologique sont bien avérés dans lesécrits médicaux de cette période, leur assimilation n'allait pas de soi etétait soit l'objet d'un débat brûlant (assimilation ou non des 'vapeurs hystériques' aux 'vapeurs hypochondriaques' par exemple), soit impensable (certains symptômes hystériques n'ont jamaisété attribués à la mélancolie). Le vice de méthode consiste donc à considérer les termes d''affection hystérique' et de 'vapeurs' parfois comme relevant d'entités nosologiques distinctes, parfois comme purement et simplement synonymes, selon les besoins de l'argumentation. Ce flottement empêche l'auteur de se confronter franchement à la question de l'indétermination des 'vapeurs', certes souvent associées à la passion hystérique, mais tout aussi fréquemment confondues avec la mélancolie ou l'hypochondrie. On espérait que cetteétude dompte enfin ce monstre protéiforme qu'est l'hystérie, mais c'est le contraire qui semble avoir eu lieu.

Rudy Le Menthéour
Bryn Mawr...

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