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  • L’histoire à l’école élémentaire depuis 1945 by Benoît Falaize
  • Patricia Legris
Benoît Falaize
L’histoire à l’école élémentaire depuis 1945
Rennes, Pur, 2016, 331p. et XVI p. de pl.

L’ouvrage de Benoît Falaize vient compléter un vide dans les recherches sur l’histoire scolaire en France à l’époque contemporaine. En cherchant à entrer dans les boîtes noires que sont les pratiques des enseignants de primaire et les traces des leçons d’histoire des cahiers d’élèves, l’auteur permet de pénétrer les coulisses de la discipline telle qu’elle est enseignée dans le premier degré et contribue à faire comprendre comment sont traduites et appliquées les injonctions ministérielles, déjà étudiées par Jean Leduc et Patrick Garcia 1. Cet ouvrage, issu d’une thèse, prolonge heureusement les réflexions des travaux sur l’histoire en primaire à des périodes antérieures, notamment ceux d’Annie Bruter, de Brigitte Dancel et d’Olivier Loubes.

Pour comprendre comment s’enseigne depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale l’histoire dans le primaire public – l’enseignement privé et les écoles d’éducation nouvelle ayant été écartés –, B. Falaize mobilise plusieurs sources. Tout d’abord, celles des producteurs des politiques scolaires, à savoir les textes officiels publiés par le ministère de l’Éducation nationale et les rapports d’inspection du département de la Charente-Maritime. S’y ajoutent les revues pédagogiques, en particulier le Journal des instituteurs, et les cahiers d’élèves conservés au musée national de l’Éducation à Rouen.

L’auteur démontre que l’histoire enseignée en primaire se disciplinarise progressivement au cours de la période retenue. Toujours chargée de former un citoyen critique, elle doit de plus en plus répondre à des attentes mémorielles, historiographiques et politiques. Au fil des années, les pratiques pédagogiques se veulent fondées sur la transmission de contenus scientifiques et se calquent donc sur celles du secondaire. Pour l’illustrer, B. Falaize adopte un plan chronologique articulé en sept chapitres qui auraient pu être réorganisés de manière plus fluide. Par exemple, le chapitre consacré à l’histoire dans les colonies, dont la période (1900–1962) déborde largement celle envisagée dans le reste de l’ouvrage, aurait mérité d’être fondu dans les deux premiers chapitres qui traitent de la période 1945–1969. De même, la présentation successive des sources dans quasiment tous les chapitres aurait pu être remaniée pour problématiser davantage et rendre encore plus percutante la démonstration.

Trois apports essentiels à l’histoire des disciplines, ainsi qu’à celle de la culture scolaire et, plus largement, des relations entre école et nation, sont fournis par l’auteur. Le premier, qui apparaît comme majeur, est la déconstruction d’une représentation erronée, trop répandue actuellement, d’un âge d’or de l’histoire scolaire entre les années 1945 et 1960. Loin [End Page 796] d’être une période de consensus chez les enseignants et d’efficacité auprès des élèves, ces années sont marquées par l’incertitude. Les instituteurs s’interrogent sur ce qu’ils doivent transmettre. Dès ce moment, plusieurs représentations de l’histoire scolaire coexistent : d’un côté, une histoire héritée d’Ernest Lavisse et actualisée, mais qui ne semble satisfaire ni les inspecteurs ni bon nombre d’élèves et d’enseignants ; de l’autre, une histoire permettant un travail actif sur les sources, une vision plus critique et locale de la discipline. En cela, la période de l’éveil (1969–1984), qui n’est pas une césure nette, ne constitue pas le moment déclencheur de l’instabilité de cette discipline.

Les chapitres consacrés aux années durant lesquelles ont été expérimentées, à la demande du ministère de l’Éducation nationale, les activités d’éveil constituent une étude inédite. L’auteur affirme, à l’aide d’enquêtes notamment, que les années de l’éveil sont un...

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