The Archaeology of Medicine in the Greco-Roman World by Patricia A. Baker (review)

L’interdisciplinarité fait à la fois la richesse et la difficulté de l’histoire de la médecine antique. Les chercheurs doivent croiser différentes sources, littéraires, épigraphiques, iconographiques et archéologiques pour saisir une manière culturelle de penser le corps, reconstituer les pratiques médicales et comprendre l’état sanitaire des populations d’autrefois. L’apport de la culture matérielle constitue un vaste champ d’études particulièrement fructueux, couvrant des domaines variés, de la paléobotanique aux instruments médicaux, en passant par les ex-voto, l’architecture des sanctuaires et des lieux de soin. Ce type de sources offre l’intérêt de livrer des informations souvent absentes des textes, axées sur l’élite, et de donner accès à la dimension de la vie quotidienne. Leur étude pose cependant des questions spécifiques de méthode qui sont au cœur de l’ouvrage de l’archéologue Patricia A. Baker, spécialiste, entre autres, de l’histoire de la médecine militaire. Ses objectifs sont issus d’une longue expérience de recherche et d’enseignement à l’Université de Kent.

L’ouvrage constitue un manuel original d’archéologie gréco-romaine, écrit de manière claire et concise, qui s’adresse prioritairement aux étudiants, mais aussi à un public plus large désireux de s’initier aux enjeux et méthodes d’une démarche archéologique scientifique.

L’ouvrage comporte sept chapitres consacrés chacun à un type particulier de source (iconographie, anthropologie physique, paléobotanique. . .) ; à chaque fois, l’auteure expose comment rassembler et analyser la documentation, et définit son apport à une histoire du corps et de la médecine. La présentation d’exemples illustre les enjeux théoriques. Chaque chapitre se termine avec des questions destinées aux étudiants afin de problématiser le contenu, tandis qu’une bibliographie permet de reprendre et approfondir le sujet.

L’introduction (1–11) expose les ambitions de l’ouvrage : montrer comment l’archéologie ne se limite ni à élaborer des typo-chronologies, ni à illustrer les textes anciens. Le cadre théorique est exposé dans le deuxième chapitre (12–28), qui retrace l’histoire des principaux concepts appliqués en archéologie et présente les principales méthodes d’investigations actuelles (fouilles, arpentage, photographie aérienne. . .). Les sources écrites font aussi partie de la culture matérielle par leurs différents supports (papyrus, pierre, plomb, bois, métal. . .), dont les propriétés et les modes de transmission font l’objet du troisième chapitre (28–57). L’apport de l’iconographie est traité dans le chapitre 4 (58–84). Aux grilles de lecture héritées de l’histoire de l’art s’ajoutent des questionnements variés de type anthropologique sur la notion de corps idéal et de norme ou sur la gestualité thérapeutique. De nouveaux niveaux d’interprétation apparaissent ainsi quand les documents sont replacés dans leur contexte de découverte et de production, comme dans le cas des ex-voto. Les instruments médicaux font partie des multiples « petits objets » associés aux soins (85–109) dont l’étude passe par l’identification de leur type et de leur fonction, non seulement pratique, mais aussi symbolique, par exemple en contexte funéraire. L’archéologie permet aussi d’appréhender les différents espaces où se prodiguaient des soins (sanctuaires, bains, hôpitaux militaires. . .), ainsi que l’impact, réel ou imaginaire, de l’environnement sur la santé (fontaines, aqueducs, latrines. . .) (110–135).

L’utilisation de nouvelles technologies scientifiques d’investigation en anthropologie physique ou paléobotanique ouvrent de nouveaux horizons susceptibles de révolutionner des idées reçues (136–159). Parmi les procédures prometteuses en cours de développement, l’analyse des isotopes stables permet de mieux comprendre les modes d’alimentation, comme par exemple l’âge du sevrage des enfants, correspondant ou non aux...