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  • Incertitude, pouvoir et résistance: les enjeux du politique dans la modernité by Carol Levasseur
  • Sylvie Lacombe
Carol Levasseur, Incertitude, pouvoir et résistance: les enjeux du politique dans la modernité. Textes réunis par Leïla Azzaria, Jean-Marie Fecteau, Jean-Guy Lacroix, Diane Lamoureux, Québec, Les Presses de l’Université Laval, coll. Sociologie contemporaine, 2006, xii-433 p.

L’ouvrage collige divers textes de Carol Levasseur, professeur de science politique à l’Université Laval, décédé prématurément en 2003. Les douze chapitres sont pour la plupart des inédits, certains sont des notes de cours, d’autres fusionnent notes de cours et textes inédits. Le résultat surprend par le ton, qui n’est pas celui d’un livre scientifique, plutôt un mélange synthétique de portraits brossés à grands traits et de lieux communs des sciences sociales.

L’ouvrage procède d’une conception du politique, très proche de la définition sociologique : pour Levasseur est politique ce qui résulte du travail de la société sur elle-même. Ses écrits s’appuient sur les travaux pionniers de C. B. Macpherson, Rosanvallon, Foucault, Gauchet, Castoriadis, Lefort, Aglietta, et d’autres plus récents comme Martucelli et Giddens.

La première moitié du XXe siècle est passablement mouvementée (perte d’emprise des élites sur le discours public, mobilisation de masse, [End Page 527] etc.) mais au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale avec la menace nucléaire, la sphère politique s’assagit, la démocratie pluraliste et représentative réussit à absorber en elle la contestation et même les partis communistes nationaux deviennent des partis comme les autres (chapitre 1). Se met ainsi progressivement en place une professionnalisation du politique (les partis deviennent des organisations permanentes gérées par des professionnels), la séduction électorale (conséquence directe du suffrage universel) et la dépolitisation des problèmes socio-économiques qui trouveront désormais des solutions technocratiques. C’est la politique du calme. Mais l’avènement de la société de consommation où triomphe le règne des images et des signes transforme cet espace politique pacifié en une scène de spectacle permanent.

La modernité implique une société civile émancipée du politique, résultat d’un assez lent procès. Ce n’est que progressivement que les gouvernements ont dû compter avec le marché, l’argent, les masses citadines, les prétentions de la science, etc. (chapitre 2). Plus le travail de la société sur elle-même se diffuse et plus l’État étend son emprise sur la société civile. Car l’État est l’instrument par lequel les rapports sociaux s’institutionnalisent.

Avec Hegel, la modernité est pleinement intelligée en tant que rupture avec ce qui la précède. L’essor du capitalisme, celui de l’industrialisation, la mise en place de l’État territorialement limité et le développement de la technoscience en sont les principaux symptômes. La modernité a désacralisé l’organisation sociale, délestant celle-ci de l’expérience passée condensée dans les pratiques traditionnelles, pour intensifier plutôt les attentes à l’égard de l’avenir. Normaliser les conduites, contrôler les mœurs, discipliner les corps, quadriller les mouvements; l’État moderne est un pouvoir administratif de surveillance de l’activité humaine alors même que ces changements se sont faits au nom de l’autonomie (chapitre 4).

Le discours postmoderne, désenchanté, engloutit tout recours aux grandes idéologies dans la création du sens, les grands récits meurent et débute alors le recyclage des idéologies sous mode microscopique. Il n’y a plus de mise en commun du sens, et prolifèrent les micro-récits flottants, éphémères et décousus. Dans le tournant communicationnel qu’ont pris les sciences sociales, il n’y a plus d’émetteur, que des destinataires éparpillés, changeant au gré des circonstances (chapitre 5).

La monnaie pour les économistes serait une énigme : chez Marx et les économistes orthodoxes, elle appartient à un monde enchanté et fétichisé. Ce qu’ils...

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