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  • Pierre Lexert, un adieu à la francophonieQuelques mots
  • Gaëtan Brulotte

Pierre Lexert est décédé à Saint-Marcel dans la Vallée d’Aoste le 9 février 20151 à l’âge de 91 ans. Journaliste, animateur culturel, poète, nouvelliste, essayiste et polémiste de grand talent, il était incontestablement l’écrivain francophone le plus visible de cette région du nord de l’Italie. Tout au long de sa carrière, il a reçu plusieurs prix littéraires, dont le Grand Prix de l’Académie française de la langue et de la littérature et le Grand Prix de la Francophonie par la Fédération des écrivains de langue française. Il a également obtenu deux fois le Prix Enea Balmas, décerné par les professeurs de français de l’Université italienne pour Le Dévoiement et pour Courts-Métrages. En France, il a été nommé Officier de l’Ordre National du Mérite et Officier dans l’Ordre des Palmes Académiques tandis que l’Institut de France lui a décerné le Prix Hure-Bastendorff en 2006. Ses écrits ont fait l’objet de plusieurs thèses ou mémoires à Fribourg, à Trieste, à Milan, à Turin.

Il a publié une quinzaine de livres, dans lesquels il aimait mélanger les genres et faire se côtoyer l’essai—souvent incisif,—le vers, la prose narrative, la chronique, la critique littéraire ou artistique (qu’il pratiquait avec beaucoup d’exigence). Quelle qu’en soit la forme, ses textes sont toujours d’une langue classique soutenue, voire recherchée. Ses nouvelles sont ingénieuses et bien ficelées (c’était un admirateur de Dino Buzzati) et sa poésie ne cesse de célébrer le désir, la sensualité et l’amour, thèmes dominants de son univers imaginaire. Nostalgie et humour y font aussi bon ménage. Deux de ses derniers livres Méandres (2013) et Extraits des égarements de Sire Rhose (2014), petits livres de joie condensée, en sont très représentatifs. Le sourire est au détour de chaque page et de chaque souvenir. S’y retrouve ce curieux mariage de légèreté et de gravité, d’irrévérence et de solennité, de rébellion et de tradition, de liberté et d’application, de fantaisie et de rigueur qui le caractérise tant. [End Page 1]

Pierre Lexert était un ardent défenseur de la langue française et de la littérature d’expression française. Il a voué sa vie à la cause de la francophonie. Pendant vingt-sept ans, il a dirigé l’Institut valdôtain de la culture, dont il anima aussi, avec courage et résilience, l’étonnante revue littéraire et artistique Les Cahiers du Ru de 1982 à 2007 (48 livraisons), revue illustrée sur papier glacé. Ami de longue date du ciéf, il a participé à plusieurs de ses congrès pour faire connaître les particularités valdôtaines. Il a longtemps plaidé pour qu’on tienne cette rencontre annuelle près d’Aoste (à Turin ou en Suisse) mais, pour diverses raisons, cela ne s’est jamais fait.

Ce fut un homme d’une intelligence fine, d’une farouche indépendance d’esprit, d’une rare sensibilité littéraire et d’une persistante vitalité intellectuelle et créatrice jusqu’à la fin de sa vie. Avec lui, la francophonie perd un de ses fervents militants.

La publication de ce texte inédit récent dans la revue nef est une façon de lui rendre hommage. L’auteur se plaignait beaucoup du blocage que le rayonnement du français rencontrait dans sa région. Il propose ici une synthèse personnelle de ce contexte agonistique. Juste avant de mourir, il a ainsi tenu une dernière fois à témoigner du fait francophone de son lieu de naissance. Ainsi apprend-on par celui qui est sans doute le plus grand écrivain de son histoire que la francophonie valdôtaine se meurt, dans l’indifférence générale. Si le fait d’informer c’est déjà un peu agir, qu’au moins cela se sache.

Distinguished Professor of...

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