Abstract

Cet article propose une analyse comparée du film Zelig de Woody Allen (1983) et du roman Mektoub (1987) de Gilles Zenou. Dans Zelig, un homme se transforme sans cesse pour ressembler à ses interlocuteurs. Gilles Zenou (1957–1989), écrivain et philosophe juif marocain, s’empare à son tour de cette figure fortement perméable en mettant en scène un personnage-narrateur qui avance dans le monde à la manière d’un caméléon. Dans Mektoub, on suit ainsi un jeune protagoniste qui évolue dans une ville imaginaire du Maghreb où grondent de multiples révoltes. L’objectif de l’étude est de cerner la thématisation et les remodélisations de “l’homme-caméléon.” Le roman de Zenou est interprété à la fois dans son contexte postcolonial et par rapport à l’identité juive. Les notions d’exclusion, d’assimilation et d’admission permettent de comprendre comment la figure de l’homme-caméléon de Zenou se distingue de celle d’Allen. Pour Allen, l’identité est avant tout une performance. Mektoub et Zelig apportent une réponse différente à la question: la formation de l’identité individuelle est-elle possible sans appartenance à une collectivité? Selon Allen, un individu peut affirmer son identité unique face aux pressions uniformisantes à condition d’être aimé au moins par une personne. Selon Zenou, l’individu n’existe pas sans ses liens à une collectivité et ne peut choisir librement son identité.

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