Abstract

Dans ses textes, Jean Genet s’adresse violemment à son ennemi, en particulier à ses juges. Cet article explore comment l’écriture lui permet d’échapper à un rapport spéculaire à ses juges. Cette approche conteste des lectures récentes selon lesquelles les fantasmes de l’écrivain l’auraient fait s’identifier aux nazis, en raison d’une angoisse à l’égard de la castration. Je propose au contraire que Genet s’intéresse plus à tordre qu’à inverser (et donc respecter) la structure hiérarchique du pouvoir. Par le biais d’une lecture de Pompes funèbres, j’examine le rapport de l’écriture au mal, notamment l’idée que la cruauté d’un jeune milicien est équivalente à la poésie. L’article montre que le meurtre et l’écriture sont présentés comme des alternatives entre lesquelles le narrateur refuse de juger. S’il y a irresponsabilité à refuser de condamner le tortionnaire, il y aussi responsabilité à reconnaître la valeur inconditionnelle de tout être vivant, même le plus vil. Genet répond ainsi à une exigence éthique en refusant d’agir en juge.

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