Theatre

ROMANS, RECITS, NOUVELLES, CONTES 441 dans Ie cadre de la recherche universitaire des ouvrages analogues aux survols (tout de m~me un peu sommaires) qu'ont effectues Clement Moisan dans L'Age de la litMrature canadienne (HMH, 193, $2.75) et Antoine Sirois dans Montreal dans le roman canadien (Marcel Didier, XLVI, 195, $7.50). (REJEAN ROBIDOUX) THEATRE II me parah essentiel de souligner d'abord Ie phenomione d'emergence d'un theatre quebecois. Dans les vingt demieres annees, une poignee d'auteurs se sont employes, avec un achamement parfois bien meritoire, a edifier, piece sur piece (c'est Ie cas de Ie dire), ce que je ne me retiens plus d'appeler une veritable dramaturgie. Naguere une troupe professionneIle , qui accordait durant sa saison une petite place a une oeuvre d'ici, semblait poser un acte de charite herolque. Cette epoque est decide.ment depassee. Si restreint qu'il demeure dans Ie nombre des pieces jouees Cet plus enCOre dans celui des oeuvres publiees), Ie theatre quebecois , desormais, non seulement fait honne figure en regard de notre roman et de notre poesie, mais peut subir honorablement la comparaison avec ce qui s'elahore sur toutes les scenes du monde. En proclamant ainsi la valeur de notre production dramatique imprimee - car il ne m'appartient pas de dresser Ie bilan des saisons theatrales de Montreal, de Quebec ou d'ailleurs - il est deux remarques fort heureuses que I'annee 1969 m'oblige a enregistrer. La premiere touche a la creation m~me, a I'invention de I'oeuvre. Comme Ie texte dramatique ne prend toute sa signification que dans I'acte de sa representation ritueIle, il importe d'insister sur Ie role primordial tenu par Ie metteur en scene dans I"achevement total d'une oeuvre: ainsi quelques praticiens de la scene sont-ils devenus les co-auteurs de certaines pieces, leur conferant par lit cette qualite irrempla~able qui leur fait transcender Ie cadre trop etroit de la pure litterature. Mon autre remarque, d'un tout autre ordre, conceme la fortune de I'edition. Jusqu'a tout recemment, il etait courant qu'une piece, meme jouee avec succes, restat manuscrite. Or - je I'ai observe deja I'an demier, et cela est aussi vrai cette annee - On publie maintenant plus de textes dramatiques, relativement passes aussi bien qu'actuels. Sous ce rapport, il convient de louer en particulier les editions Lemeac a qui I'on doit une bonne moitie des oeuvres parues en 1969. L'experience la plus forte et la plus neuve de I'annee me paralt "tre celIe de Double jeu (Lemeac, 213, $2.00) de Fran~oise Loranger. Nous touchons ici Ie sommet - provisoire - non seulement de la carriere d'un 442 LEITERS IN CANADA auteur, mais du theatre quebecois lui-m~me. Fran,oise Loranger avait pratique avec un rare bonheur la methode c1assique de theatre, dans des pieces comme Une Maison ... un jour (1965) ou Encore cinq minutes (1967). Avec Le Chemin du Roy (Lemeac, 135, $2.00), «comedie patriotique » ecrite par Fran,oise Loranger en collaboration avec Ie metteur en scene Claude Levac, s'opere un passage vers quelque chose de tout different. Plutot que d'un texte litteraire bien demarque, iI s'agit d'un «canevas dramatique» ouvert a l'invention et consacrant sans equivoque la preponderance du jeu sur I'ecrit. Mais quelles que soient son originalite et I'emotion qu'elle provoque, iI se peut que cette« piece » devienne vite caduque, datee qu'elle est par Ie cri retentissant du General de Gaulle qui lui sert d'assise. Je doute donc qu'elle puisse etre reprise, mais elle restera importante historiquement et politiquement comme un excellent exemple de bon theatre engage. En revanche, Double jeu, qui va plus loin encore dans la creation profonde et collective , me paralt un pur chef d'ceuvre qui ne vieillira pas. A partir d'un test de comportement que sont appeles 11 vivre un groupe d'etudiants adultes, c'est une veritable « ceremonie de la naissance 11 l'amour de la vie» qui ,accomplit devant nos yeux et en nOus. Techniquement les acteurs sont appeles atirer parti de multiples variantes expressives selon I'occurrence...