In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Histoires littéraires des Canadiens au XVIIIe siècle by Bernard Andrès
  • Daniel Vaillancourt (bio)
Bernard Andrès, Histoires littéraires des Canadiens au XVIIIe siècle, Québec, Presses de l’Univsersité Laval, coll. L’archive littéraire au Québec, série Approches, 2012, 327 p.

L’essai de Bernard Andrès vient faire la synthèse de ses travaux sur le XVIIIe siècle « canadien » qui s’échelonnent sur une vingtaine d’années, retraçant les grandes lignes des « histoires littéraires » qu’il donne à lire. Le lecteur pourra y découvrir une galerie de portraits intellectuels, littéraires et rhétoriques de personnages méconnus ou carrément inconnus et faire le point sur les différentes mutations politiques et culturelles qui ont marqué la mesure d’un sujet canadien entre 1680-1690 et 1806. Il pourra surtout voir le jeu des dynamiques culturelles qui s’incarne dans un espace littéraire qui est en devenir. La périodisation repose sur des choix que l’auteur explique clairement. D’une part, en amont, la décennie 1680-1690 est retenue en raison de l’émergence de l’ethnonyme canadien. En aval, la période se termine par la naissance du journal Le Canadien qui annonce un renouveau générationnel. Il s’agit donc d’un long XVIIIe siècle, articulé en fonction de l’histoire nord-américaine et des différents interlocuteurs coloniaux qui vont, inévitablement, engendrer leur lot de prises de paroles et de dialogues. En travaillant sur les écrits de la Nouvelle-France, ce qu’il décide de ne pas nommer de cette appellation, il en vient à soulever les questions usuelles réservées à ce corpus : s’agit-il bien de textes appartenant à la littérature québécoise? Peut-on vraiment parler de Lumières dans le contexte canadien? Quel est le régime identitaire des Français qui ont décidé de prendre pays, avec ou sans la monarchie française, avec ou sans la monarchie britannique? Autant de questions qui sont élucidées dans l’argumentaire, problématisées dans les notes en bas de pages et re-contextualisées par l’érudition bibliographique.

La saisie des textes se fait en fonction de parti pris méthodologiques et d’interprétations historiques marquées. Par exemple, Andrès évoque les interprétations divergentes de la Conquête qui est plus l’effet d’une reconstruction a posteriori de discours historiques mus par des inspirations nationalistes ou fédéralistes. Démontrant textes en main comment toute une génération d’écrivants va bénéficier du changement de régime pour construire une posture discursive, il maintient une sorte de ligne de crête entre « la vision catastrophique d’un trauma collectif » et la vision [End Page 169] « angélique [ … ] d’un passage en douceur ». Il prendra position dans la question de l’origine des lettres québécoises. Deux hypothèses s’affrontent : ceux qui optent pour l’origine des Lettres après l’Union du Haut et du Bas Canada, soit une fois qu’un appareil institutionnel et des savoirs se mettent en place, et ceux qui jugent qu’aux lendemains de la Conquête, on assiste à une émergence des lettrés. Andrès penche plus du côté de l’hypothèse Conquête. Les deux hypothèses éclairent différemment la matière littéraire comme telle. Dans le premier cas, elle est chose institutionnalisée, production, tandis que dans le second, elle est le fait de « protoscripteurs », évolue selon la dynamique du processus et évoque le bruissement des discours de fondation, plutôt que la clarté élocutoire de leur autorité.

L’ouvrage est divisé en trois parties. Une première partie établit les bases théoriques de l’entreprise, définissant ce que l’auteur signifie par « l’archéologie du littéraire ». La seconde partie considère le Canadien comme un personnage inventé, figurant d’une histoire plutôt qu’acteur. La dernière partie, dont les textes et les événements traités se déploient historiquement après la Conqu...

pdf

Share