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  • Essai de reconstruction du “Sac de Saint-Gilles”: Le Charroi de Nîmes (v. 548–79)
  • Rupert T. Pickens

Ce que je nomme “Le Sac de Saint-Gilles” couronne une série de récits secondaires dans le Charroi de Nîmes (composé vers 1140) que Guillaume adresse à l’empereur Louis oublieux et ingrat, d’abord pour lui démontrer qu’il mérite plus qu’aucun autre d’être récompensé pour ses services (v. 64–293)1 et ensuite, quant aux fiefs qu’un Louis penaud finit par lui proposer, pour déclarer qu’il serait déshonoré si les héritiers létigimes en étaient dépossédés (v. 305–403). “Le Sac,” enfin, justifie la demande que fait Guillaume de l’“Espaigne” (v. 480–505) en contrariant des offres de partages du royaume lui-même qui sont encore plus ignominieuses (v. 380–412, 527–47). Tout en regrettant les refus de son loyal champion et ayant écouté son récit, Louis le dote enfin d’une “Espaigne” qui de fait ne lui appartient plus (v. 512–26).

Ainsi, dans les manuscrits cycliques de la Geste de Guillaume d’Orange,2 ce récit au sujet de la prise de Saint-Gilles du Gard par les Sarrasins sert-il à lancer la croisade qui constitue la seconde moitié du Charroi et à déclencher la Prise d’Orange. C’est sans doute à cause de [End Page 165] l’importance du “Sac” en général, et peut-être encore de l’introduction d’une matière jusqu’ici étrangère à la chanson de geste, à savoir la courtoisie des troubadours et des premiers romanciers français qui a dû attirer également l’intérêt des copistes tout au cours de la transmission du Charroi, que les vingt premiers vers de ce récit surtout constituent le passage le plus brouillé de tout le poème.3

Récemment, j’ai consascré un article au “Sac” qui tient compte à la fois de la tradition manuscrite et des implications de la nouvelle matière (Pickens, “Le Sac de Saint-Gilles”),4 mais pour des raisons techniques je me suis trouvé dans l’impossibilité d’inclure en appendice la reconstruction du récit que l’analyse des variantes me suggérait. Je profite avec gratitude de la générosité des rédacteurs de Romance Notes qui me donnent l’occasion de publier la reconstruction avec commentaire et en plus de la comparer avec trois éditions importantes du Charroi de Nîmes.

“Le Sac” commence ex abrupto dans la laisse XXIII après une reprise de laisse similaire (en italique ci-dessous; cf. XXII, v. 527–37) où Guillaume refuse la couronne. Selon McMillan (32 vers sans compter la reprise):

... –“Non ferai, sire,” Guillelmes respondié; Ge nel feroie por tot l’or desoz ciel.545 De vostre hennor ne vos quier abessier,Ainz l’acroistrai au fer et a l’acier;Mes sires estes, si ne vos quier boisier. Ce fu au tens a feste saint Michiel: Fui a Saint Gile, lors fui ge chiés un ber; 550 Herberja moi le cortois chevalier, Molt me dona a boivre et a mengier, Fain et avaine a l’auferrant corsier. Quant ce fu chose que eüsmes mengié, Il s’en ala es prez esbanoier 555 O sa mesnie, le gentil chevalier, […………………………………………] Quant par la resne me sesi sa moillier. Ge descendi, ele me tint l’estrier, Puis me mena aval en un celier, E del celier amont en un solier; [End Page 166] 560 Ainz n’en soi mot, si me chaï as piez. Cuidai, beau sire, qu’el queïst amistiez Ou itel chose que feme a home quiert. Se gel seüsse, ne m’en fusse aprochiez Qui me donast mil livres de deniers. 565 Demandai li: ‘Dame, feme, que quierz? – Merci, Guillelmes, nobile chevalier! De ceste terre quar vos preigne pitié, Por amor Deu qui en croiz fu drecié!’ Par la fenestre me fist metre mon chief; 570 Tote la terre vi plaine d’aversier, Viles ardoir et violer mostiers, Chapeles fondre et trebuchier clochiers, Mameles tortre a cortoises moilliers, Que en mon cuer m’en...

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