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Parole d’Echo? Pernette au miroir des Rymes Gisèle Mathieu-Castellani E CRITURE FÉMININE, écriture femme, écriture du féminin, économie libidinale de polarité féminine dans le texte: autant de notions qui pour n’être point synonymes, il s’en faut, posent le problème de l’inscription du sexe dans l’écriture. Si la langue a un code neutre, dans le langage apriori étranger au sexe, le sexe se réinscrit néces­ sairement, car “ parler n’est jamais neutre.” 1Parler, mais écrire? Reste à savoir si l’écriture hypostasiée ne transcende pas la différence des sexes. Soit qu’elle l’annule, si l’on postule l’existence d’un sujet qui serait réduit au cogito, idéalement asexué. Soit plutôt qu’elle combine les polarités masculine et féminine inscrites dans l’embryon avant la différenciation sexuelle en une bisexualité orientée par une dominante. Ne dit-on pas du reste qu’un homme écrivain est aussi femme, gros de cet enfant qu’il met au monde,2qu’une femme, dès lors qu’elle écrit, est aussi homme?3 Si l’on substitue à la notion simple mais peu opératoire, inefficace et dangereuse,4 d’écriture féminine, la notion plus fine, mais plus problématique, de marques du féminin, en situant la différence au niveau de renonciation, de ces traces que laisse le sujet dans sa parole lorsqu’il s’approprie la langue, quand on postule qu’une polarité F (féminine) s’inscrit—peut s’inscrire—dans l’écriture, que l’écrivain soit femme, homme, neuter, ou uterque, plusieurs questions se posent. La réinscription du sexe dans le langage renvoie au postulat d’un langage sexualisé, des bases pulsionnelles de la phonation, selon l’hypothèse de Fonagy, reprise et réaménagée par G. Rosolato, qui situe toute parole dans la bipolarité maternelle/paternelle.5La réinscription du sexe dans l’écriture complète cette première interrogation en reprenant l’opposition de la parole et de l’écriture,6celle-ci aimantée par la symbolique pater­ nelle, celle-là orientée vers la mère; on sera alors amené à distinguer, comme le fait Rosolato (p. 119-20), les deux versants de l’écriture. Mais il faudrait aussi s’interroger sur le rapport de chaque sexe à l’amour et à l’érotisme, et la question admet au moins trois réponses, selon que l’on admet l’identité de la libido dans les deux sexes, comme Freud et Lacan, que l’on soutient l’hypothèse d’une spécificité de la libido féminine, comme Mélanie Klein et l’école anglaise, ou que l’on tente, comme Vol. XXX, No. 4 61 L ’E sprit C réateur Michèle Montrelay, de dépasser l’opposition.7 A ces trois questions s’ajoute alors celle que pose la définition des critères ou marques distinctives dont il conviendrait d’élaborer le système en répérant un jeu de différences dans rénonciation. Délicates, complexes, ces questions, encore en débat aujourd’hui, sont-elles pertinentes lorsqu’il s’agit des textes de la Renaissance? Et d’abord quel sens donner à la notion même d’“ écriture” dans la produc­ tion littéraire de cette époque, sinon celui de marques historiques propres à un genre, à une forme, à un registre? S’il est aisé de repérer des énoncés idéologiques, qu’en est-il de l’énonciation là où l’écriture est d’abord réécriture, là où le poids des modèles et de leurs normes rhétoriques, des traditions et de leurs conventions spécifiques semble interdire toute singularité? Préfaces, dédicaces, hors-texte et paratexte peuvent bien thématiser le droit de la femme à la culture, à la parole, à l’écriture: Louise Labé, Marie de Gournay font entendre la voix de ces femmes que le nouveau “ complexe de Cornélia” conduit à revendiquer pour bijoux leurs écrits8; romans, récits, traités, voire poèmes, tiennent discours aussi, exposent des positions nouvelles, positions “ théoriques” , posi­ tions d’écriture:9 ainsi Hélisenne de Crenne...

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