[PDF][PDF] Bullshit jobs

D Graeber - E mploi, 2018 - journals.openedition.org
D Graeber
E mploi, 2018journals.openedition.org
Dans Bullshit Jobs, le regretté David Graeber soutient une thèse qui a rencontré un large
écho: une part croissante et élevée des emplois n'a ni sens ni utilité et rend malades celles
et ceux qui les occupent,«à l'idée qu'ils [elles] n'apportent aucun bienfait au monde»(p. 285).
Il explore les facteurs économiques, politiques et sociaux qui expliquent cette prolifération
des tâches inutiles, et cherche à comprendre pourquoi ces emplois sont souvent bien mieux
rémunérés que d'autres emplois beaucoup plus utiles socialement comme ceux des …
Dans Bullshit Jobs, le regretté David Graeber soutient une thèse qui a rencontré un large écho: une part croissante et élevée des emplois n’a ni sens ni utilité et rend malades celles et ceux qui les occupent,«à l’idée qu’ils [elles] n’apportent aucun bienfait au monde»(p. 285). Il explore les facteurs économiques, politiques et sociaux qui expliquent cette prolifération des tâches inutiles, et cherche à comprendre pourquoi ces emplois sont souvent bien mieux rémunérés que d’autres emplois beaucoup plus utiles socialement comme ceux des enseignant· es ou des infirmier· ères. D. Graeber n’était jusqu’alors pas un spécialiste des questions de travail, même si sa curiosité et ses convictions idéologiques l’avaient déjà entraîné à publier assez loin de son domaine de compétence académique initial, l’anthropologie des rapports monétaires et de la dette. À l’origine du livre, un court billet d’humeur1 publié en 2013 dans la revue anarchiste en ligne Strike, qui fit le buzzsur le Net, suscitant une avalanche de témoignages de travailleurs qui s’y reconnaissaient. Le concept de «bullshit jobs»(ou «jobs à la con») fit ainsi le tour du monde, rencontrant visiblement l’expérience vécue par des milliers de participants au monde du travail. D. Graeber définit les «bullshit jobs» comme «une forme d’emploi rémunéré si totalement inutile, superflue ou néfaste que même le salarié ne parvient pas à justifier son existence, bien qu’il se sente obligé de faire croire le contraire»(p. 37). La cause du phénomène? Pour l’auteur, les boulots inutiles se multiplient non pas pour obéir à une quelconque rationalité économique, mais bien plutôt pour satisfaire la volonté de contrôle et de domination des managers, dans une logique non pas capitaliste mais féodale, où ce qui compte est de se créer «un cortège de fidèles qui permet non seulement d’étaler son faste et sa magnificence mais aussi de prodiguer un certain nombre de faveurs politiques»(p. 247).
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