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  • Les femmes dans la critique et l'histoire littéraire
  • Isabelle Tremblay
Reid, Martine , ed. Les femmes dans la critique et l'histoire littéraire. Paris : Honoré Champion, 2011. PP 209. ISBN 978-2-7453-2232-6. 50 € (Hardcover).

Dirigé par Martine Reid, cet ouvrage évalue la place des femmes auteurs au sein du panthéon littéraire. Certes, Martine Reid est consciente qu'à lui seul ce collectif ne triomphera pas de la résistance qu'oppose le champ littéraire français à la critique féministe, mais dans l'attente de travaux de synthèse sur la question de l'écriture au féminin, il comble une lacune importante.

Une première partie fait état de la place des femmes dans l'histoire littéraire. Jean-Claude Arnould procède d'abord à expliquer la réception contradictoire de l'œuvre de Marie de Gournay. L'absence de références à ses devancières et à ses contemporaines, omission que certains ont taxée d'« antiféminisme » (22), relève d'une stratégie pour « transcender la généricité » (27), tentative habile pour éviter de valider les préjugés qu'entraîne la différenciation des sexes. Tandis qu'Arnould met en lumière l'intérêt du discours de Marie de Gournay pour la critique féministe, Éliane Viennot rappelle le constat qui fait l'unanimité : la place des femmes dans l'histoire littéraire demeure marginale. Soit elles font l'objet de jugements de valeur moralisateurs, de commentaires dénigrants et de médisance, soit leurs œuuvres sont cantonnées dans un genre précis. De toute évidence, l'histoire littéraire fait la part congrue aux femmes, mais comment porter un regard objectif sur le « panthéon littéraire national » (31) sans tenir compte du Dictionnaire (1804) de Fortunée Briquet, dont Nicole Pellegrin fait ressortir tout le prix, et De l'influence des femmes sur la littérature française (1811) de Mme de Genlis ? Bien que ni l'un ni l'autre n'aient connu la réception qu'ils méritaient, les deux ouvrages font la défense et la promotion des compétences féminines ayant trait à « l'action littéraire » (105) et constituent des repères incontournables en matière d'histoire littéraire. Il faut également signaler que l'emploi de statistiques est ici ambigu. Ne faudrait-il pas déterminer le pourcentage des femmes auteurs publiées, comme le fait Shelly Charles, pour juger de la place qu'elles occupent dans les dictionnaires, les recueils et les manuels de littérature ? À son tour, Christine Planté déplore l'éviction des femmes dans l'histoire littéraire et s'interroge sur les mécanismes à l'origine de ce « phénomène de perte » (60) qu'ont subi les femmes poètes. En passant en revue le sort de Marceline [End Page 123] Desbordes-Valmore, de Louise Ackermann et de Marie Krysinska dans l'histoire littéraire, elle attire l'attention sur les critères d'évaluation des femmes poètes et pose la question de la méthode à adopter pour triompher de l'oubli auquel la critique les a reléguées. Pour sa part, Myriam Dufour-Maître regrette que depuis l'émergence de la notion de « galanterie », redéfinie récemment par Alain Viala, celle de « préciosité » soit passée au second plan et avec elle, la dimension du féminin.

Une seconde partie donne à voir le traitement que réserve le discours critique aux femmes. Joan Dejean signale que jusqu'en 1770, le substantif « auteur » s'appliquait également aux deux sexes pour ensuite faire place à l'expression « femme auteur ». De concert avec le discours lexicographique, le discours critique minore la participation des femmes à la littérature dont l'activité est réduite au roman, un « genre facile où tout est permis » (90), pour reprendre les termes de Jean-François de La Harpe, dont le Cours de littérature ancienne et moderne exerça une influence décisive sur la diffusion du canon littéraire entre 1798 et 1860. Une femme auteur est-elle forcément romancière ? Voilà la question que traite...

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