In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Dérives de la fin. Sciences, corps & villes
  • Pascal Riendeau (bio)
Jean-François Chassay , Dérives de la fin. Sciences, corps & villes. Montréal, Le Quartanier, coll. Erres essais, 2008, 224 p., 24,95$

Dans la conclusion de Dérives de la fin. Sciences, corps & villes, Jean-François Chassay rappelle l'élément essentiel qui guidait son ouvrage : « l'imaginaire de la fin repose sur un postulat : la fiction est une forme de savoir, une manière de connaissance du monde ». On est ici au cœur de la démarche de l'auteur, qui s'intéresse à treize écrivains et un cinéaste dans ce parcours autour des fins, car celles-ci varient tant par leur forme, leur nature que leur contenu. Divisé en quatorze chapitres, eux-mêmes intégrés à trois grandes sections, « Le poids de l'histoire », « Apocalypse intime » et « Terribles métamorphoses », le livre traite d'ouvrages québécois, français, américains et britanniques publiés depuis les années 1970 — mais plusieurs sont très récents — écrits par des auteurs connus (Philip Roth, Michel Houellebecq) ou moins (Lorette Nobécourt, Rober Racine). Chassay se tient très loin d'une réflexion sur les littératures nationales et ne procède pas non plus à des comparaisons entre les littératures de différents pays. Bien qu'il ne néglige pas les particularités de chaque contexte socioculturel, celui-ci reste toujours à [End Page 95] l'arrière-plan et ne sert qu'à éclairer le texte de fiction. Il s'efforce de créer des liens entre des œuvres littéraires a priori fort différentes, mais son ouvrage conserve un aspect un peu disparate, notamment parce que la méthode d'analyse varie d'un chapitre à l'autre. En revanche, on doit admettre que la souplesse méthodologique de l'auteur se révèle judicieuse. Ainsi, aucune grande thèse n'est proposée, mais plusieurs hypothèses soulignent l'importance de la diversité et de la pertinence des discours de (sur) la fin. C'est cette même souplesse qui m'autorise à ne convoquer que cinq des quatorze chapitres pour rendre compte de l'ensemble, ceux qui m'apparaissent les plus originaux, les plus pertinents ou les plus achevés, et qui représentent des exemples de chacune des problématiques étudiées par l'auteur : la fin du monde ou le début d'un monde nouveau, la temporalité et la mort, la ville, la marche et les ruines, ainsi que le corps (qui se défait, qui renaît, qu'on clone).

Dans la première section, « Le poids de l'histoire », le chapitre consacré au roman Le pays des eaux du romancier britannique Graham Swift nous entraîne du cô té de l'histoire comme lecture, mais surtout comme récit : « Or, l'histoire est une narration confuse, sans ordre, à partir de laquelle on ne peut tirer de principes, mais uniquement des indices ». C'est par un renversement qui privilégie les indices aux principes que Chassay analyse le roman de Swift, entre autres les signes qui montrent la fin de l'histoire, discipline qu'enseigne le narrateur, la fin de sa longue lignée familiale et la fin du monde professée par un de ses étudiants, qui défend « l'idée eschatologique d'une fin prochaine de l'humanité ». Celle-ci signifie qu'un nouveau monde s'apprête à naître, mais assurément plus comme on l'imaginait avant : « Le mythe des commencements a quelque chose de séculier [. . .] [et] reprend la théorie de l'évolution ». Aussi, Chassay montre habilement que l'aperception du passé du narrateur, qui laisse de multiples voix narratives s'exprimer à travers lui, se rapproche du modèle développé par Hannah Arendt, à savoir que notre conception du « temps n'est pas un continuum » et que le présent est davantage une « brèche dans le temps », ce qui explique la singulière lecture de l'histoire proposée dans le roman.

Dans la deuxième section, Chassay analyse avec acuité les films Husbands et The Killing of a Chinese Bookie de...

pdf

Share