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Reviewed by:
  • Figures, lectures. Logiques de l'imaginaire — Tome I, and: La ligne brisée. Labyrinthe, oubli et violence. Logiques de l'imaginaire — tome II
  • Gaëtan Brulotte (bio)
Bertrand Gervais , Figures, lectures. Logiques de l'imaginaire — Tome I, Montréal, Le Quartanier, coll. Erres essais, 2007, 248 p., 24,95$
Bertrand Gervais , La ligne brisée. Labyrinthe, oubli et violence. Logiques de l'imaginaire — tome II, Montréal, Le Quartanier, coll. Erres essais, 2008, 216 p., 25,95$

Voici les deux premiers tomes d'une entreprise qui en comptera trois et qui sont le fruit de plusieurs années de recherche subventionnée et de cours universitaires. L'auteur a refondu des articles en un tout cohérent d'une grande profondeur et vraiment stimulant à lire pour qui s'intéresse à la littérature.

Le premier volume traite de ce que Bertrand Gervais appelle des « figures » et de leurs modalités d'apparition à partir d'analyses poussées de textes contemporains (américains, français et québécois) et de certaines adaptations cinématographiques. L'auteur y examine les étapes de cette apparition, ce qu'elle présuppose (première partie, « Préfigurer »), ce qu'elle engage (deuxième partie, « Figurer ») et ce qu'il advient des formes ainsi générées (troisième partie, « Défigurer »). Le deuxième tome des Logiques de l'imaginaire aborde des ensembles complexes comme l'imaginaire du labyrinthe lié à l'oubli. Le dernier, à venir, portera sur l'imaginaire de la fin.

Le mot « figure », ici, est employé dans un sens très flexible et ne renvoie pas du tout aux figures de rhétorique. Il n'est d'ailleurs pas question de forme dans ces essais. L'acception particulière donnée au mot rejoint la construction d'un personnage et de son aura, par exemple, un moment de rêve éveillé, une production imaginaire qui surgit au contact des choses et des signes et qui permet une coalescence de pensées divergentes. Le sens en est ainsi vraiment vaste, si vaste que le monde pourrait bien être constitué de figures dans l'imaginaire des humains, car « ce qui s'ouvre, quand une figure apparaît, c'est le théâtre du sens, qui met en scène nos pensées et nos désirs ». « Mon parti pris est de traiter la figure comme une expérience, une relation au monde et à ses signes » (I, 38). Aussi, la figure n'existe-t-elle pas en soi, elle est le résultat d'un travail, d'une interaction, voire d'une projection, au point qu'on pourrait parler d'investissement figural. Ainsi l'éphèbe qui obsède von Aschenbach dans La Mort à Venise de Mann ou Lolita qui le fait pour le Humbert de Nabokov deviennent des figures parce que le fruit d'une élaboration imaginaire. [End Page 92]

Une façon de faire naître la figure est le musement, activité qui surgit en particulier quand l'esprit du lecteur quitte la page pour vagabonder dans l'aire ouverte par le sens. Mais comme muser, c'est se perdre dans la contemplation de figures, les héros de récits et de romans se livrent eux aussi au musement, puisqu'il permet d'être dans un état de rêverie qui procède de l'enchantement, de l'obsession ou d'un envoû tement, ce pourquoi c'est un thème largement exploité par la littérature et le cinéma.

Ici, tout lettré sera comblé par les analyses substantielles et toutes en subtilités auxquelles Gervais se livre, que ce soit, par exemple, au sujet d'un bref texte d'Echenoz, « L'occupation des sols », qui tourne autour de l'image, pour un père et son fils, d'une femme et d'une mère morte, ou de la figure de l'idiot dans Body Art de Don DeLillo et Being There de Jerzy Kosinski. Avec encore, entre autres, une étude de L'adversaire du Français Emmanuel Carrère, il examine comment se développent la figure du dédoublement et les jeux entre réel et imaginaire à travers le personnage mythomane de Romand, un rat...

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