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Reviewed by:
  • Passage de la modernité. Les intellectuels québécois et leurs revues (1778-2004)
  • Corinne Beauquis (bio)
Andrée Fortin, Passage de la modernité. Les intellectuels québécois et leurs revues (1778-2004), 2 eédition, Québec, Les Presses de l'Université Laval, coll. Sociologique contemporaine, 2006, x-445 p.

Andrée Fortin est professeure au Département de sociologie de l'Université Laval depuis 1982. Récipiendaire de plusieurs prix, ses domaines de recherche incluent la sociologie du Québec et la sociologie de la culture. Ses travaux portent, entre autres, sur des questions liées à la postmodernité, à l'identité, aux arts et aux réseaux sociaux, autour desquelles s'articule la présente réflexion.

Si Lise Gauvin s'est intéressée spécifiquement à la revue Parti pris(1975), si Michel Biron a compilé un répertoire des Revues littéraires de langue française du Québec et du Canada des origines à 1995(1999), si Gérard Boismenu et Guylaine Beaudry ont étudié le volet numérique des revues universitaires (2002), Fortin envisage son panorama des revues québécoises comme un prétexte pour « retracer les transformations [du] rapport collectif [des intellectuels] au social et au politique à travers une de leurs pratiques ». Elle se positionne d'ailleurs elle-même moins dans le courant de recherche de son regretté collègue Fernand Dumont sur les revues québécoises que dans celui de Jean-François Sirinelli dont [End Page 89]plusieurs travaux portent sur les intellectuels français (1990). Pas de confusion possible, réitère l'auteure, l'objectif est bien ici de « cerner l'insertion des intellectuels [québécois] dans la cité ».

À la fois diachronique, car elle couvre un peu plus de deux cents ans d'histoire, et synchronique, car elle se divise en trois périodes distinctes (la prémodernité, la modernité et la postmodernité), elles-mêmes organisées en chapitres, cette étude est touffue. Chacune des trois parties, en se situant par rapport à la modernité, propose une analyse du premier éditorial de chaque revue publiée au cours de la période identifiée. L'auteure a retenu plus de six cents revues en tout. La conclusion est suivie d'une annexe du corpus par ordre chronologique et selon les genres, ainsi que d'un index fournissant par ordre alphabétique les références du texte à toutes les revues citées. Il est donc aisé de naviguer dans l'essai. La première édition de l'ouvrage portait sur environ cinq cents revues et s'arrêtait au début des années 1990. L'organisation des parties et des chapitres reste identique dans la deuxième édition, sauf en ce qui concerne la dernière partie qui compte un chapitre supplémentaire.

Selon Fortin, la « fonction intellectuelle » apparaît avec la modernité dont les contours se dessinent à la fin de XIX esiècle, se cimentent dès la fin de la Première Guerre mondiale, et commencent à s'effriter au terme des années 1970. La première partie, intitulée « Du politique à l'intellectuel : les lumières du 19e siècle », montre que c'est une prise de conscience politique et nationale qui a favorisé la création de revues de plus en plus spécialisées au cours du XIX esiècle, alors que le XVIIIe siècle avait bénéficié de la distribution de gazettes. Afin de servir la démocratie et de cerner l'identité canadienne-française, les élites intellectuelles, assurées de la bonne marche de l'histoire, veulent diffuser leurs connaissances. Des revues universitaires ou associées à des sociétés savantes et des revues à coloration libérale émergent à partir des années 1860, dans lesquelles on prône les qualités associées au progrès. Ce dernier ne manquera pourtant pas de dévoiler ses revers lorsque se manifestent les questions ouvrières, celles de l'exode aux É tats-Unis et de l'arrivée des immigrants. Fortin souligne que la marche vers l'autonomisation du champ intellectuel est lente, et que celui-ci demeure subordonné aux progrès politiques...

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