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Reviewed by:
  • Les passages obligés de l'écriture migrante
  • Janet M. Paterson (bio)
Simon Harel, Les passages obligés de l'écriture migrante Montréal, xyz éditeur, coll. Théorie et littérature, 250 p., 27$

L'écriture migrante est devenue un phénomène important au sein de l'institution littéraire québécoise et canadienne ainsi qu'en témoignent les colloques, les articles et les essais consacrés à ce sujet. L'ouvrage de Simon Harel, Les passages obligés de l'écriture migrante, contribue de manière importante aux débats et à la réflexion sur un phénomène somme toute assez récent. En effet, ce n'est que depuis une trentaine d'années que les mouvements de migration ont modifié les paramètres de la littérature québécoise en y inscrivant des romans au sujet de l'émigration et de l'exil de la part d'écrivains et d'écrivaines venus d'Haïti, du Brésil, de l'Italie, de l'Égypte, de l'Iran, etc.

La réflexion de Harel sur l'écriture migrante se manifeste par le biais de deux discours différents : un discours polémique fondé en grande partie sur le social et une analyse des romans de Naïm Kattan, Régine Robin, Antonio D'Alfonso et Émile Ollivier.

Les débats sont lancés dans le premier chapitre et reviennent de manière régulière tout au long de l'ouvrage. Harel soulève trois questions larges, complexes et fondamentales. Tout d'abord, tissant des liens entre littérature et société, il met en évidence le rapport compliqué de la littérature migrante aux mythes fondateurs de l'enracinement et de l'identité québécoise : [L]a littérature des communautés culturelles du Québec est radicalement politique, puisqu'elle justifie un acte de contestation des mythes fondateurs de l'enracinement de l'identité québécoise. Par ailleurs, cette littérature est perçue sous la forme d'une extériorité troublante qui pose la question difficile de l'intégration ou encore du pluralisme culturel ». Dans le même contexte, Harel se demande si la fascination au Québec pour les écrits migrants ne signalerait pas « le désarroi de la figure de la communauté en un temps de mondialisation cruel ».

Cette hypothèse pousse l'auteur à formuler une autre question fortement polémique : « Faut-il alors imaginer une redéfinition du projet national québécois ? » Harel revient plusieurs fois sur la question de la légitimité symbolique du projet national québécois et de l'identité québécoise. C'est ainsi dans un cadre très vaste — politique et socio-culturel — qu'il situe les écritures migrantes.

Si l'on ne peut qu'apprécier les débats que Harel soulève de manière franche et éclairante au sujet du concept de la nation québécoise en tenant compte des écrits migrants qui manifestent, sur le plan littéraire, la présence de changements socioculturels majeurs au Québec, on reste perplexe face à sa remise en question fréquente de ce qu'il appelle les « discours euphoriques sur la migration ». Évoquant la « valorisation idyllique de l'exil », la qualité « quasi démiurgique attribuée à l'écriture migrante dans le discours social québécois » ou encore la « portée extatique [End Page 119] » des théories récentes sur la migrance, il critique ce qu'il perçoit comme étant les faiblesses des discours consacrés à l'écriture migrante. Il n'est pas aisé, toutefois, de saisir la portée exacte de ces commentaires parce que fréquemment les sources ne sont pas citées. De quels discours « euphoriques » s'agit-il en fait ? Il faudrait le savoir, car plusieurs critiques tels Alexis Nouss, Daniel Castillo Durante, Mary Jean Green, Lucie Lequin ont mis en évidence le caractère dysphorique et traumatisant de l'écriture migrante.

La plus grande partie du livre est consacrée à l'analyse de textes migrants. Dès le départ, je soulignerais qu'il s'agit de brillantes analyses qui éclairent de façon magistrale...

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