Thèmes et variations. Regards sur la littérature franco-ontarienne. Actes du colloque tenu à l'Université de Hearts, du 29 avril au 1er mai 2004 (review)

« Dynamisme, vitalité, diversité sont sans doute les mots qui caractérisent le mieux la littérature franco-ontarienne actuelle », déclarent Lucie Hotte et Johanne Melançon, en introduction aux actes du colloque « Thèmes et variations » tenu en 2004. Ce qui est vrai pour la production littéraire l'est aussi pour la critique qui s'y intéresse, comme en témoigne le titre même. Lors d'un colloque précédent, La littérature franco-ontarienne : voies nouvelles, nouvelles voix (tenu en 2001 et publié chez Le Nordir en 2002), la directrice Lucie Hotte soulignait la diversification de la thématique et des pratiques d'écriture depuis les années 1990. Le colloque de 2004 confirme avec éloquence ce nouveau paysage littéraire.

L'excellent travail de Melançon et de Hotte doit être souligné, qui ont su regrouper des écrivains et des chercheurs d'envergure, en début de carrière ou non, permettant des regards critiques aussi variés que stimulants. Fait intéressant qui renforce encore l'évolution critique, les analyses ne reposent plus essentiellement sur une perspective sociologique. La structure des actes se montre judicieuse : la réflexion s'attarde d'abord sur l'espace, enjeu majeur de la production franco-ontarienne, puis se tourne vers les œuvres de Daniel Poliquin, suivies de la poésie et de la chanson, pour se pencher finalement sur différentes pratiques d'écriture. Yolande Grisé et Doric Germain, observateurs de longue date de la production franco-ontarienne, démarrent le colloque sur une note dynamique lors de leurs conférences inaugurales. La littérature, voie essentielle pour exprimer la réalité franco-ontarienne, connaît désormais une grande diversité, preuve de sa maturité, déclarent-ils. L'ouvrage se termine avec une table ronde, suivie d'une discussion, où Melchior Mbonimpa, Didier Leclair, Jean Mohsen Fahmy et Arash Mohtashami-Maali répondent à la question lancée par Stéphane Girard sur le rapport de l'écrivain avec l'autre, qu'il soit la communauté des écrivains, des lecteurs... ou eux-mêmes.

Quatre études forment la partie consacrée à l'espace. À partir des réflexions d'Henri Mitterand, Lucie Hotte souligne que dans trois pièces d'André Paiement, de Jean Marc Dalpé et de Michel Ouellette, on note une actantialisation de l'espace, qui supporte, déclenche l'événement et constitue l'objet idéologique principal des œuvres. L'espace nordique, marqué par la relation père-fils, véhicule la mort. Or si cet espace implose, il indique surtout un renouveau dans la dramaturgie franco-ontarienne, tournée vers l'espoir : la fille de la famille. Une évolution positive apparaît aussi dans L'homme qui pleure et Tintin au pays de la ferveur d'Alain Bernard Marchand. L'analyse symbolique menée par Claudia Labrosse montre combien les voyages thérapeutiques en Asie, proposés dans les textes, se révèlent des rites initiatiques; l'exil permet un sens aigu de la liberté. De son côté, Kathleen Kellett-Betsos ramène le lecteur dans l'espace torontois à travers les textes d'Hédi Bouraoui et de Didier Leclair. Malgré leurs peintures différentes de Toronto, on retrouve chez les deux auteurs des bribes de roman mémoriel (Régine Robin) qui corrigent l'histoire empirique. Tandis que Bouraoui croit impossible la rencontre des « quatre solitudes » canadiennes, Leclair présente une vision utopique d'un pays fondé sur l'immigration. De paradoxal, l'exil devient une richesse, constate enfin Elena Marchese dans son étude du Totem des Baranda de Melchior Mbonimpa, car il mène à la prise de conscience de l'individualité et permet la liberté.

L'œuvre de Daniel...