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  • Europe de l’Ouest: France
  • Bruno Thibault

Œuvres de création

Bouraoui, Nina. Sauvage. Paris: Stock, 2011. ISBN 9782234064393. 235 p.

Nina Bouraoui est née à Rennes en 1967, d’un père algérien et d’une mère bretonne. Auteure d’une douzaine de romans et récits, elle a reçu le prix Renaudot en 2005 pour Mes Mauvaises Pensées. Ses textes sont traduits dans une quinzaine de langues et parlent de l’enfance algérienne, de l’amour lesbien, de la censure et de la transgression des tabous religieux et sociaux, de l’expérience du déracinement et de la désertion. Ce dernier roman, Sauvage, qui est un roman à suspense, ne fait pas exception à la règle. L’héroïne, nommée Alya, est une jeune adolescente qui a perdu son amour d’enfance, Sami, une sorte d’alter ego, disparu subitement dans la campagne algérienne. A-t-il été enlevé? Tué? Et pourquoi? Pendant cent jours, la jeune fille prie pour le retour de son ami et confident, mais sans résultat. Elle se tourne alors vers l’écriture, mais sans renier sa foi. Son récit porte sur cette disparition et sur ce deuil impossible. Alya se remémore au jour le jour leur relation et décrit leur milieu, leurs voisins, le groupe d’immeubles où ils habitent et où règne une sorte de fièvre. Bouraoui souligne qu’au seuil des années 1980 les habitants d’Alger attendaient de la religion qu’elle vienne renverser le régime, la corruption, le cynisme et le matérialisme ambiant. En même temps ils attendaient la technologie venue des pays du nord qu’elle libère l’homme des tâches ingrates et renverse l’ordre ancien des choses. Sur ce fond d’attentes contradictoires, d’apocalypse ou de parousie annoncées, de peur et de violence souterraines, le roman témoigne du rapport complexe de l’auteure à la ville d’Alger, qui est à la fois le socle fondamental de son enfance et le repère architectural de son imaginaire. Ce portrait de ville est amoureux et angoissant, car la ville semble prise entre l’avancée du désert et l’étendue de la mer, comme en un étau. De plus, le livre dresse le portrait réussi d’une époque où tout bascule pour une adolescente incertaine, saisie par une soif d’absolu et par une sorte de mysticisme. Dans son roman, l’auteure distingue deux sortes de peur: la peur chaude et la peur froide; la peur tétanisante, qui fige les gestes et qui glace le sang; et la peur vertigineuse, celle qui excite et qui pousse à aller plus loin, vers le danger ou vers le mystère. Alya observe:

Je n’ai pas peur la nuit avant de m’endormir, je n’ai pas peur des esprits, j’ai peur de ce qui existe. Je crois que j’ai peur de la vie, comme on [End Page 250] me l’a donnée, proposée. Parce que j’ai toujours l’impression de ne pas avoir le choix. D’être obligée de suivre les autres, le monde. La marche du temps. C’est comme un écrasement d’avoir cela. D’être obligée de l’accepter pour devenir une vraie personne, c’est-à-dire une personne qui trouve sa place, qui s’inscrit dans ce monde et qui participe, avec les autres, à la marche, sans jamais pouvoir l’arrêter, ou lui faire de sens. La rotation des planètes. Toujours.

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du Boucheron, Bernard. Salaam la France. Paris: Gallimard, 2010.
ISBN 9782070130009. 210 p.

Bernard du Boucheron est né en 1928. Énarque, il a fait sa carrière dans l’industrie et a dirigé un groupe de commercialisation de produits pétroliers. Aujourd’hui à la retraite, Bernard du Boucheron est l’auteur de quatre romans remarqués dont Court Serpent, qui a reçu le grand prix de l’Académie française à sa parution en 2004. Dans Salaam la France, le protagoniste, Frédéric Le Saulnier, est un jeune médecin français qui débarque de m...

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