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  • Un regard sur le Maghreb
  • Patricia Geesey
Samira Sayeh. La Génération de 52: conflits d’hégémonie et de dépendance. Reconsidération identitaire de la littérature algérienne en langue française d’avant l’indépendance. Paris: Éditions Publisud, 2010. ISBN 9782362910012. 265 p.

Dans cette étude intéressante, Samira Sayeh, professeure de français à l’Université du Kansas, nous invite à reconsidérer les textes fondateurs de la littérature algérienne de langue française, à savoir les romans des pionniers littéraires Mouloud Feraoun, Mouloud Mammeri et Mohammed Dib. L’auteur propose que ces trois écrivains soient vus sous l’angle de la littérature régionale française, lançant ainsi un défienvers les idées reçues depuis plus de soixante ans de la critique littéraire qui examine la littérature algérienne dite “nationale.”

L’objet de cet essai est d’opérer une analyse critique de la première génération des romanciers d’origine arabe et kabyle, “en les replaçant dans les contextes historique, géographique, politique et littéraire qui les ont vus naître” (11), pour ainsi dire l’époque “départementale française de l’Algérie” (11). Sayeh prend comme point de départ la position parfois ambiguë qu’ont connue les premiers romans de ces trois écrivains dans le canon littéraire algérien, à cause de leurs liens avec une époque qui précède l’indépendance de ce pays. De même, certains critiques littéraires dans le passé n’ont pas toujours approuvé le statut [End Page 277] de “textes fondateurs” de la littérature algérienne nationale pour ces écrits, parce qu’il était question de la sensibilité révolutionnaire de ces auteurs. La question que Sayeh pose est: “[. . .] peut-on maintenir avec certitude que leurs premiers textes appartiennent à une littérature nationale algérienne [. . .] alors que l’Algérie faisait encore officiellement partie intégrante de la France?” (14). Après avoir étudié le contexte historique qui a vu naître cette littérature, l’auteur viendra à sa réponse: la possibilité de considérer ces romans pionniers dans le cadre “d’une littérature en langue française” (24) ou d’un contexte régionaliste mène à une considération plus nuancée et crédible de ces romans et de leurs auteurs. Comme Sayeh le dit: “Il s’agit aussi, et surtout, de repenser une terminologie et des concepts vagues qui, malheureusement, continuent d’être ignorés et qui ont mené, inévitablement, à des conclusions trop hâtives en raison de la douloureuse histoire de l’Algérie durant l’ère départementale française” (26).

Évoquant le rôle et les contributions de Feraoun, Mammeri et Dib (tous les trois décédés, à présent) comme “hommes frontières” (25), Sayeh souligne l’ambiguïté de ces hommes en tant qu’écrivains dont l’appartenance à une communauté “nationale” était vue comme problématique, pendant et après leur vie. Dans le chapitre intitulé “Qu’est-ce que la littérature algérienne?” Sayeh rappelle aux lecteurs qu’au début des années 1950, l’étiquette “écrivain algérien” était réservée aux auteurs d’origine européenne, comme, par exemple, les membres de la célèbre “École d’Alger.” Feraoun, Dib et Mammeri auraient été qualifiés “écrivain musulman” (49) selon les conventions de cette ère. La difficulté à l’époque de désigner correctement la nationalité de ces romanciers vient de la problématique des identités et appartenances en Algérie départementale, d’où l’importance donnée dans cette étude de réexaminer le contexte historique et politique des années 1950 en ce qui concerne le développement de la littérature algérienne de langue française.

Le lecteur trouvera le chapitre intitulé “Réception Critique” fascinant parce qu’il présente une analyse détaillée des comptes rendus publiés dans les journaux et les revues en Algérie et en France concernant les premières publications des trois auteurs. Les recherches de Sayeh illustrent que la réception donn...

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