Abstract

In the industrializing and urbanizing USSR, the canteen was a political and ideological ambition of the Bolsheviks: its aim was first to promote the efficiency of production. The idea was to provide rationally planned and prepared meals. Canteens were thus the place of a healthy diet, but also of a political education and kulturnost (“civilizing process”). Yet with the food crisis and rationing, the canteen became, for Soviet workers, the only location for a regular meal. On the ground, improvisation dominated. Canteens were lacking everything: buildings, refrigerated storage area, cutlery, staff and especially food. Dirty premises, a very poor quality of food, and monotony created discontent among the workers. Canteens were the symbol of the Soviet failure to keep promises of a brighter tomorrow. They were also the melting pot of the Soviet experience, a common, essential anthropological and political experiment, a learning school of real socialism, a fundamental place in the formation of the “Soviet man.”

Abstract

Dans l’URSS en train de s’industrialiser et de s’urbaniser, la cantine correspond d’abord à une ambition politique et théorique des bolcheviks. Elle doit favoriser l’efficacité de la production. Il s’agit de fournir une alimentation ration-nellement pensée et préparée. Lieu d’une alimentation saine, la cantine doit également être celui d’une éducation politique et de la kulturnost (« civilisation des mœurs »). La crise alimentaire et le rationnement imposent progressivement la cantine comme le seul lieu possible d’une alimentation assurée et régulière des ouvriers soviétiques. Sur le terrain, la plus grande improvisation domine. Tout manque aux cantines : matériaux pour les bâtiments, chambres froides, équipements, personnel et surtout aliments. La saleté, la qualité déplorable de la nourriture, la monotonie ne peuvent que susciter l’insatisfaction et le mécontentement. Les cantines sont le symbole de l’impuissance soviétique à tenir les promesses des lendemains radieux. Elles sont également le creuset de l’expérience soviétique, fondatrice d’un rapport, mécontent mais accepté, au pouvoir et à ce qu’il donne. Dans ces conditions, la fréquentation de la cantine devient, pour le Soviétique, une expérience anthropologique et politique essentielle, une école du socialisme réel, un lieu fondamental de la formation de l’ « homme soviétique ».

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