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Reviewed by:
  • Cinna. Tragédie, 1643
  • Jean-Marc Civardi
Pierre Corneille : Cinna. Tragédie, 1643. Édition critique par Alain Riffaud. (Textes littéraires français, 614). Genève: Droz, 2011. 248 pp.

L'origine de ce livre se trouve peut-être à la fin du volume dans les quelques pages sur l''Actualité de Cinna' au regard d'événements politiques tout à fait contemporains. Pour le reste, c'est une édition de très bon aloi. Alain Riffaud a retenu le texte — en orthographe modernisée — de l'édition de 1682, la dernière revue par Corneille, et en [End Page 548] cela c'est un choix différent de celui de Georges Couton (1643) dans la collection de la Pléiade. La collation du texte est correcte et les remarques de vocabulaire ou de style pertinentes. Signalons seulement une coquille au v. 714: il faut lire 'à garder'. Les variantes et les notes historiques sont placées en annexe. Figure aussi une série d'appendices intéressants et nécessaires à la bonne compréhension de l'œuvre: à l'épître au financier Pierre Puget de Montauron et l'examen écrits par Corneille s'ajoutent des extraits ou résumés de Sénèque, de Montaigne, de Guez de Balzac et de Scudéry (sur un sujet historique assez proche, La Mort de César, tragédie de 1636). Un 'Dossier critique' vient encore compléter le volume, où sont présentés les sources et la réception de la pièce, ainsi qu'un rappel des principes rhétoriques à l'œuvre dans une telle tragédie. La bibliographie, en dehors des textes de référence, est peut-être un peu trop générale et aurait gagné à être davantage centrée sur les nombreux articles et études consacrés à Cinna. Il est clair dès l'introduction que Riffaud s'inspire des principes de la génétique moderne; il analyse le choix du sujet par Corneille et ses diverses inventions (le personnage d'Émilie) à partir des conceptions d'Aristote et d'un récit exemplaire trouvé chez Sénèque. Après les critiques essuyées pour Le Cid et pour Horace, cette tragédie lui apporte effectivement la consécration. L'analyse du vraisemblable extraordinaire (au cœur des discussions avec Chapelain et d'autres) est très bien maîtrisée, tout comme celle des notions d'amitié et de magnanimité. Si Riffaud se refuse à décrypter cette tragédie d'après une grille historique précise des événements de l'époque, il ne néglige pas l'écho inévitable d'un tel sujet à l'époque ni surtout l'importance de l'éthos politique, autour de la différence si chère au dix-septième siècle entre un monarque et un tyran. Cette dénonciation de la tyrannie au profit du 'prince révélé' qu'est Auguste (selon la belle formule de la page 183) reste pour l'éditeur un aspect essentiel de la modernité de Corneille et fait presque de ce livre une édition engagée, au meilleur sens du terme, sur le pouvoir et la vertu.

Jean-Marc Civardi
Université De Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines
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