Abstract

Le roman Le Vaillant Petit Tailleur d'Éric Chevillard (2003), écrivain dont la production figure peut-être parmi les œuvres en prose les plus notoires de la littérature française actuelle, a été perçu par la critique comme une attaque sévère contre la forme traditionnelle du conte de fées. Explorant une nouvelle piste, cet article aborde le roman sous l'angle de la réception littéraire, argumentant que la préoccupation cruciale de son narrateur-auteur est au contraire celle qui consiste à inventer un lecteur de son propre texte. Qui est ce lecteur en jeu dans l'œuvre? Quel(s) lecteur(s) ce texte se présume-t-il? Quelles figures de lecteurs imagine-t-il au fil des pages? Et quelle place cette œuvre métatextuelle, intelligemment agencée, demandant recul, ruse, et perspicacité de la part de son lecteur, laisse-t-elle à la jouissance, à l'envoûtement? L'analyse du Vaillant Petit Tailleur sous cette lumière inédite permet de reconsidérer l'attitude distanciée souvent attribuée au lecteur de la métafiction moderne. S'il est un écrivain tenant d'une conception 'intellectuelle' du roman, refusant l'immersion mimétique à l'égard du personnage au profit d'un développement excessif du potentiel réflexif du texte, Chevillard est pourtant fort loin de vouer son lecteur à l'abstinence du plaisir.

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