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Reviewed by:
  • Vie et mort du couple en Nouvelle-France. Québec et Louisbourg au XVIII e siècle
  • Jean-Philippe Garneau
Vie et mort du couple en Nouvelle-France. Québec et Louisbourg au XVIII e siècle. Josette Brun. Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2006, 200 p., 34,95 $.

Il y a plusieurs raisons de se réjouir de la publication de cette belle étude sur la vie conjugale et le veuvage en Nouvelle-France. Tiré de la thèse de doctorat de l’auteure, l’ouvrage se démarque d’abord par son approche « genrée » et comparative. Préoccupée par la construction du féminin et du masculin dans les discours sur le mariage ou la viduité, attentive aux différences qui marquent l’expérience des hommes et des femmes, Josette Brun apporte une importante contribution à l’histoire du genre en Nouvelle-France. L’historienne ouvre également des perspectives novatrices en comparant la capitale canadienne et la ville-forteresse de l’Île-Royale. Sur le fond, ce livre prend clairement position contre l’interprétation suggérée encore récemment par Jan Noel au sujet de la condition privilégiée des femmes en Nouvelle-France. Pour l’auteure de Vie et mort du couple en Nouvelle-France, la colonie ne rend pas les femmes plus libres qu’ailleurs et leur statut comme leur champ d’action dans la colonie s’inscrivent clairement à l’intérieur du modèle patriarcal de la société d’Ancien Régime, ni plus ni moins.

Pour nous en convaincre, l’auteure débusque les contraintes du discours officiel qui structurent inégalement les rôles féminins et masculins, en prenant soin d’analyser les textes produits dans la colonie ou pour elle (le rituel de Mgr de Saint-Vallier ou le Traité abregé des ancienes loix de François-Joseph Cugnet, par exemple). Pour bien montrer combien les écarts aux normes patriarcales sont peu fréquents ou relèvent du « cadre prévu par la loi et la sagesse populaire » (p. 97), le parcours de vie familiale et la pratique juridique de groupes de conjoints et de personnes veuves sont également scrutés à la loupe. Il importe de souligner que cet exercice est rendu possible [End Page 119] la patiente reconstitution démographique de chacune des familles étudiées, à laquelle se greffe l’analyse des actes notariés de ces dernières.

La démonstration se déploie en quatre chapitres. Le premier s’attarde à la vie conjugale. Il nous rappelle la discrimination qui existe alors dans le partage des rôles entre époux ou la hiérarchie dans le couple qui découle entre autres de l’incapacité juridique de la femme mariée. Mais on nous montre aussi que les épouses de Québec ou de Louisbourg agissent peu pour le compte de leur mari et ne se retrouvent pas souvent devant notaire pour gérer leur bien ou celui de la communauté conjugale. « Les maris sont bel et bien maîtres chez eux, conclut l’auteure, comme le veulent l’État et la loi » (p. 33). Il faut reconnaître cependant que la rencontre avec l’homme de loi ne fait pas foi de l’ensemble des rapports que la femme mariée a entretenus dans l’espace public (qui, dans la société d’Ancien Régime, déborde largement l’étude du notaire), et dans l’espace domestique encore moins. On peut donc se demander, par exemple, si ces femmes étaient aussi ignorantes des affaires de leur mari que l’auteure semble le suggérer (notamment p. 34). Le second chapitre examine l’option du remariage qui s’offre aux conjoints survivants. Bien que la discussion fasse très habilement appel à plusieurs sources ou registres d’analyse, le portrait d’ensemble ne surprendra guère les spécialistes : de nombreuses différences distinguent nettement l’expérience des veuves de celle de veufs (fréquence et délais de remariage, activité sexuelle durant la période de viduité, écart d’âges entre les nouveaux époux, etc.). On notera tout de même quelques particularités...

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