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IMAGE ET SYMBOLE Le miroir dans la tradition syriaque Jan M. F. Van Reeth (FVG – Antwerpen) Sa puissance se développe toujours au bord de l’aveuglement. (…) Il y a en ce don (…) un Narcisse paradoxal, parfois perdu en abyme, bref un repli spéculaire (J. Derrida, Mémoires d’aveugle, Paris 1991, p. 10). Bien que le motif du miroir ait joué un rôle assez important dans la littérature syriaque, un seul article y a été consacré, par le savant éditeur de l’œuvre de Saint Éphrem.1 Le Père Edmund Beck y a rassemblé un grand nombre de péricopes et croyait pouvoir discerner quatre thèmes fondamentaux , suivant en cela une étude comparative plus ancienne.2 Malheureusement , il a négligé ou méconnu l’aspect spéculatif. Il est vrai qu’un nombre de spécialistes continue à nier toute influence hellénistique sur S. Éphrem (dont on se demande parfois s’il savait le grec; en tout cas il n’a écrit qu’en syriaque) bien que son œuvre soit indéniablement imprégnée par la pensée grecque.3 Cet état de la recherche est d’autant plus déplorable que la pensée chrétienne a orienté l’image platonicienne du miroir en un sens nouveau, qui annonce la tradition arabe. Daniélou a magistralement mis en lumière ce développement,4 bien qu’il se soit limité à l’œuvre de Grégoire de Nysse, sans se rendre compte que les sources du Cappadocien se trouvent non seulement dans l’œuvre de Plotin, mais aussi dans la tradition syriaque antérieure . 1 E. Beck, “Das Bild vom Spiegel bei Ephräm”, Orientalia Christiana Periodica 19, 1953, pp. 5-24. 2 J. Behm, “Das Bildwort vom Spiegel I. Korinther 13, 12”, dans: Reinhold-Seeberg - Festschrift für Praxis des Christentums, Leipzig 1923, pp. 315-342. 3 U. Possekel, Evidence of Greek philosophical concepts in the writings of Ephrem the Syrian (CSCO 580, Subs. 102), Louvain 1999. 4 J. Daniélou, Platonisme et théologie mystique. Essai sur la doctrine spirituelle de Saint-Grégoire de Nysse (Théologie 2), Paris 1944, pp. 223-235: I. Le miroir de l’âme. 102 Jan M. F. Van Reeth Ainsi nous voudrions démontrer que la conception que les auteurs syriens se sont formé de la fonction spéculative du miroir est fondée d’une part sur la tradition biblique tardive, qui est déjà fortement influencée par la pensée hellénistique, plus spécialement stoïcienne, et d’autre part sur l’héritage païen, remontant jusqu’à la mythologie babylonienne. Ensuite, nous essayerons de montrer comment cette même tradition syrienne est parvenue à une synthèse originale de ce double fil d’idées, synthèse dont l’initiateur s’avérera être le grand hérésiarque Bardésane (Barday an). La tradition biblique a été élaborée à partir d’un des derniers livres de l’Ancien Testament, celui de la Sagesse, qui date probablement du Ie siècle avant notre ère. Nous en relevons ce péricope (7: 23-26) révélateur: καὶ διὰ πάντων χωροῦν πνευμάτων νοερῶν καθαρῶν λεπτοτάτων πάσης γὰρ κινήσεως κινητικώτερον σοφία διήκει δὲ καὶ χωρεῖ διὰ πάντων διὰ τὴν καθαρότητα. ἀτμὶς γάρ ἐστιν τῆς τοῦ θεοῦ δυνάμεως καὶ ἀπόρροια τῆς τοῦ παντοκράτορος δόξης εἰλικρινής. διὰ τοῦτο οὐδὲν μεμιαμμένον εἰς αὐτὴν παρεμπίπτει. ἀπαυγάσματα γάρ ἐστιν φωτὸς ἀιδίου καὶ ἔσοπτρον ἀκηλίδωτον τῆς τοῦ θεοῦ ἐνεργείας καὶ εἰκὼν τῆς ἀγαθότητος αὐτοῦ. en pénétrant tous les esprits les intelligences les plus pures et subtiles, la sagesse est la plus mobile elle traverse et meut tout par sa pureté; car elle est un souffle de la puissance divine et une claire émanation de la gloire du Tout-Puissant: ainsi, rien de souillé ne tombe en elle. Car elle est un reflet de lumière éternelle, miroir sans tache de l’action divine et une image de sa bonté. La divinité créatrice représentée comme l’esprit subtil de la sagesse qui pén ètre toutes choses est évidemment une idée qui rappelle le stoïcisme; des expressions telles que διήκει δὲ καὶ χωρεῖ et διὰ πάντων (…) πνευμάτων νοερῶν le confirment,5 bien que cette σοφία (νοῦς ou πνεῦμα) créatrice soit distincte en tant qu’émanation, de la divinité suprême même: elle est, selon la formulation du Symbole de Nicée: φῶς ἐκ φωτός — lumen de lumine,6 c.-à-d. le reflet de la Lumière divine dans le miroir de Son ἐνέργεια. D’autre part, la doctrine de la préexistence de l’âme telle que nous la présente le Livre de la Sagesse 5 J. Weber, Le Livre de la Sagesse (La sainte Bible 6), Paris 1943, pp. 391, 395, 449-450. 6 Weber, Sagesse, p. 450, Denzinger § 54. [3.135.219.166] Project MUSE (2024-04-25 10:54 GMT...

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