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17 Rationalité universelle et rationalité africaine Coovi Houedako L’humanité est globalement confrontée, aujourd’hui comme jamais auparavant, à deux rationalités: la rationalité occidentale fondée sur la raison du plus fort ou «la force prime sur le droit» et l’autre rationalité faite de résignations ou de luttes pour la survie. Au départ, la rationalité occidentale n’était pas prédestinée à cette fin: elle était et demeure la fine fleur des connaissances philosophiques, scientifiques, technologiques et culturelles au service du progrès économique et social de tout le genre humain mais le grand capital s’en est accaparée et en a fait l’instrument de sa politique appelée «mondialisation». En ce début du troisième millénaire, la pertinence d’une discussion de haut niveau sur la problématique de la rationalité n’est plus à démontrer. De nos jours le décodage du génome humain ou carte génétique de l’homme est chose faite. La greffe du cœur et le clonage sont devenus des banalités tout comme les voyages dans l’espace. Le développement de la physique nucléaire effraie le physicien lui-même et laisse l’humanité pantoise. L’anthropologie et la paléontologie en font savoir toujours un peu plus sur l’homme lui-même et sur le règne animal. Les télécommunications et la cybernétique ont virtuellement aboli les distances et transformé le monde en un gros village, en y diffusant des informations à une échelle toujours plus grande. Pourtant, l’humanité a encore fort à faire pour repousser le mur de l’ignorance. En cela, les sciences sociales en général et la philosophie en particulier ont un rôle important à jouer. Aussi est-ce à cette source que nous irons chercher la sémantique de la rationalité et nous essaierons de montrer comment, évoluant comme en marge de cette rationalité universelle, subsiste une rationalité africaine fondée sur des connaissances et une praxis propres. 202 La rationalité, une ou plurielle? La raison universelle La rationalité universelle, au plan de la géographie, s’identifie à la rationalité occidentale; ce signe d’identité a été consacré par l’histoire. Par rationalité universelle nous entendons les règles, les lois et les préceptes au moyen desquels l’idéalisme et le matérialisme résolvent les problèmes gnoséologiques. D’un point de vue historique, le chemin parcouru par la rationalité, des origines à nos jours est si long, ces diverses matérialisations dans l’activité humaine, à travers la science et la technique sont si nombreuses qu’il serait fastidieux, voire prétentieux de vouloir les passer en revue. Dans le cadre précis de cet exposé, nous ne retiendrons que la formalisation idéaliste de ce concept par Hegel et sa critique matérialiste par Karl Marx. Loin d’être arbitraire, le choix de ces deux penseurs se justifie par le fait que dans son ensemble, l’histoire de la philosophie moderne ne repose que sur ces deux sources de rationalités: idéalisme et matérialisme. Comme le mentionne si bien Lénine dans Matérialisme et empiriocriticisme il n’y a que deux partis en philosophie: le matérialisme pour lequel la matière, la nature, l’être, le physique est la donnée première, tandis que l’esprit, la conscience, les sensations, le psychisme est la donnée seconde et l’idéalisme pour lequel c’est l’inverse. Selon lui, «il y a en philosophie une tendance matérialiste et une tendance idéaliste et, entre elles, diverses nuances d’agnosticisme» (op. cit. p.151). S’appropriant la conception hegelienne de la dialectique, Karl Marx la remit mutatis mutandis sur les pieds parce que, selon ses propres termes dans Le Capital, celle-ci reposait sur la tête. Les différences d’appréciations entre les deux auteurs trouveront une expression assez claire dans la Critique de la Philosophie du droit de Hegel et dans d’autres ouvrages à caractère polémique tels que Sainte Famille ou Critique de la Critique dirigée contre les frères Bauer, Misère de la Philosophie en réponse à Philosophie de la Misère de Proudhon. En ajoutant à cet ensemble L’idéologie allemande et les Onze thèses sur Feurbach on perçoit les contours et les méandres de la conception dialectique du monde et de l’histoire chez ce penseur révolutionnaire. La...

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